Hotel de la Serpe.
Laurent Bastard a mené une petite enquête sur l’activité professionnelle de la mère Jacob, ce qui nous permet de mieux comprendre, au tout au moins d’imaginer l’atmosphère d’une auberge, mère d’une société de Compagnons du tour de France.
(Publié dans « Images des Compagnons du tour de France » Ed Jean Cyrille Godefroy 2010, page 199) :
« …en consultant les Archives départementales d’Indre et Loire le relevé des fiches d’hôtels établis par le commissariat de police de Tours en 1858-les années antérieur n’ont malheureusement pas été conservées-, on mesure combien était fructueux ce type d’activité. Pour chaque mois, ce relevé comporte les nom et prénom des personnes descendues dans chaque hôtel, leur âge, leur lieu de naissance, leur domicile, le lieu de délivrance du passeport pour l’intérieur, le lieu d’ou ils viennent et celui ou ils vont.
En ce qui concerne l’hôtel Jacob, ces relevés permettent de constater que 68 ouvriers boulangers y sont descendus en 1858, soit un peu plus de cinq chaque mois, avec quelques pointes comme en juillet, avec l’arrivée de 15 boulangers, ou en octobre, avec 11 autres. La plupart sont âgés de 18 a 25 ans, mais il en est de beaucoup plus jeunes, qui n’ont que 14, 15 ou 16 ans.
Pour eux, la Mère Jacob fut vraiment une seconde mère…
Mais on aurait tort de penser que l’acceptation du titre de Mère des boulangers privait sa titulaire de toute autre clientèle.
En effet, en cette même année 1858, Madame Jacob accueille en son établissement 48 autres personnes, de profession très variées, des artisans, dont un corroyeur, un tourneur, un typographe, un ferblantier, un megissier, un serrurier, un peintre, un bonnetier, un tisseur, des menuisiers, une couturière… Ainsi que d’autres gens de petits métiers, un « chargeur » (sans doute un portefaix, un fort des halles), un bimbelotier, un rémouleur, un marin, un domestique, un marchand de parapluies, les plus insolites sont, un artiste dramatique, un chanteur, un lutteur, un marchand forain, et un « artiste d’agilité ».
La mère Jacob a donc hébergé 68 boulangers au cours de l’année 1858. Ce qui ne signifie pas qu’ils y sont tous restés, les capacités de l’établissement ne le permettant pas, ces Compagnons et aspirants ont dut souvent être loges par la suite chez leur patron… »
« …Ceci dit, la Mère Jacob n’a pas accueilli tous les ouvriers boulangers venus à Tours pour y travailler ou pour y faire étape. Une centaine d’autres sont arrivés à Tours en cette année 1858 et la moitié est descendue dans près de trente auberges différentes. Toutefois, j’ai relevé que la Mère Jacob avait un concurrent sérieux en la personne d’un denommé Robert, qui a herbergé cette année la près de 50 ouvriers boulangers. Il est possible que cet hôtelier ait été le Père d’une société adverse, celle des « Sociétaires de la bienfaisance », que les Compagnons boulangers du Devoir appelaient les « rendurcis ».
(Note de L Bourcier : Une fois l’embauche trouvée, l’aspirant ou compagnon était dans 99 % des cas logés et nourris chez son patron, ils ne fréquentait la mère que lors de son arrivée et y logeait jusqu’à ce que le rouleur y trouve de l’embauche. Il vient chez la mère lors des différentes assemblées, lors de la recherche d’une nouvelle embauche, lors des banquets de réception et quelques fois pour y vider quelques bouteilles entre amis lorsque l’emploi du temps et la bourse le lui permettaient.)
Couplets dédiés à la bonne mère Jacob, pour le jour de sa fête.
Air : de Bagneres.
Le jour si cher de votre anniversaire,
Ici ce soir nous retrouve joyeux
Bonne maman votre gai caractère,
Offre pour nous des attraits merveilleux.
Un jour viendra que le destin prospère,
Réunira dans le divin séjour,
Nos devorants et notre bonne mère,
Enfants, chantons, pour fêter ce beau jour.
Touraine, Touraine, encore,
Riche de ce trésor.
Oh ! Cité fortunée, accueillez mon transport.
Lorsque le ciel vous plaça sur la terre,
En vous dotant d’un coeur si généreux,
Des compagnons vous deviez être mère,
Et du devoir un trésor précieux.
Conservez nous votre amitié sincère ;
Inimitable, vous serez toujours
Du riant tour la meilleure des mères.
Enfants, prions pour conserver ses jours.
Touraine, Touraine, encore,
Riche de ce trésor.
Oh ! Cité fortunée, accueillez mon transport.
Libourne le Décidé.
(Mémoires d’un Compagnon du tour de France p.261)
Beau acrostiche de Libourne le Decidé – Chaque première lettre de chaque ligne lue verticalement, forment LIBOURNE LE DECIDE.
A suivre…
Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D.