Les boulangers à la construction de temple ?

Extrait du livre, Mémoire d’un Compagnon Boulanger, de 1859,
de Jean-Baptiste Edouard ARNAUD, Libourne le Décidé.

« – J’ai lu, continua Martel, dans les parchemins où nous avons puisé nos instructions du rite compagnonnique, que dans le principe il n’y eut que les quatre corps du bâtiment qui furent initiés aux mystères du Devoir.

– En douteriez-vous, interrompit le Rouleur ?

– Oui, j’en doute, et selon moi c’est une absurdité qui prouve une mauvaise tradition de la part des successeurs des grands maitres Jaques et Soubise, car je prouverai qu’il était impossible qu’à la construction du temple de Jérusalem, il y eut une aussi ridicule distinction entre un nombre aussi considérable d’ouvriers, même en supposant que le Compagnonnage fût véritablement ce qu’il semble à l’oeil fasciné du récipiendaire.

Et, d’ailleurs, en supposant qu’il n’y eut que les quatre principaux corps du bâtiment, l’édifice eut été incomplet. Selon moi, il est à croire que plusieurs corporations se réunirent pour n’en former qu’une; ainsi, les Serruriers, les Forgerons et les Mécaniciens d’une part; les Tailleurs de pierre, les Sculpteurs et les Statuaires de l’autre; les Charpentiers de grosses oeuvres et ceux du même corps qui travaillaient le menu, d’où est probablement dérivé le nom de Menuisier. Il dût aussi y avoir des Tisseurs pour faire les draperies, et des fondeurs pour faire les ornements d’or et d’argent qui contribuaient à la grande richesse de l’édifice.

Toutes ces suppositions me font croire que les ouvriers Boulangers devaient y être en grand nombre, pour fournir aux besoins des dix-huit mille individus employés aux travaux de cette merveille. Et en supposant qu’il n’y en eût pas eu un seul à cette époque, je connais aussi un grand nombre de corps d états qui, aujourd’hui, appartiennent au Compagnonnage, et dont alors on n’avait que faire.

Ainsi, je soutiens, pour clore cette longue dissertation, que, si l’ancienneté ou l’utilité des corps faisait autorité, nos prédécesseurs ne contribuèrent pas moins que les vôtres à l’accomplissement de cette grande oeuvre. »

Lithographie de Compagnons boulangers du Devoir, nous observons le roi Salomon au sommet de sept marches, et le Compagnon boulanger au sommet de cinq marches. (Seconde moitié du 19ᵉ)

Lithographies des Compagnons boulangers (Seconde moitié du 19ᵉ), deux compagnons à genoux sur les sept marches du temple qui mènent au grand roi Salomon.