Le tour de France des compagnons boulangers, pâtissiers, RFAD.
Un an après l’intégration officielle de notre société à la Fédération Compagnonnique, il me semble intéressant d’expliquer à tous, sa raison d’être, son histoire, son fonctionnement et ses objectifs.
Le métier de boulanger est presque aussi ancien que le produit « pain », on peut le dater de l’antiquité dans sa forme commerciale, celui de pâtissier, à la renaissance.
Boulangers au VII siècle avant J.C. Terre cuite béotienne. Musée du Louvre.
Après la Seconde Guerre Mondiale, par une demande accrue, la boulangerie s’est orientée sur des produits fabriqués rapidement, ce qui entraine une baisse des qualités gustatives et nutritives du pain.
En 1950, la filière pain, jusqu’alors exclusivement artisanale se divise en deux, artisans commerçants et les industriels. En 1960 apparait un troisième secteur, les grandes surfaces. De nos jours, le secteur artisanal représente 70% du chiffre d’affaire de la filière.
En 1990, grâce à une ferme volonté de la filière artisanale, un retour à des méthodes de fabrications traditionnels. Pétrissage lent, longue fermentation, suppression d’additifs, etc… Permet de proposer à la clientèle des produits plus sains et plus gouteux.
En 1993, un décret d’état règlemente et défini la baguette de tradition française et en 1998 l’appellation et l’enseigne de boulangerie.
Malgré une consommation en baisse de pain due à un prix en baisse des autres denrées alimentaires, le nombre d’entreprise artisanale n’a que sensiblement diminué depuis 40 ans, 37 000 en 1980, 32 000 en 2019, mais en nombre d’établissement c’est 35 000, car un phénomène s’est développé depuis 20 ans, un seul artisan détient souvent plusieurs boulangeries.
En 2000, un grand groupe de grandes surfaces disait « Après nous être attaqué au marché de la viande, nous allons nous attaquer celui du pain », s’il a réussi à réduire énormément le nombre de boucherie en France, il n’a pas eu le même résultat avec la boulangerie artisanale.
En 2019, les effectifs employés par les artisans restent relativement stables, environ 110.000 salariés sont employés en 2016, 20.000 apprentis formés par an, 35.000 ouvriers boulangers, 10.000 ouvriers pâtissiers et 45.000 personnels de vente.
Logo de la Confédération Nationale des artisans Boulangers-Pâtissiers.
Le métier de pâtissier s’exerce le plus souvent dans les boulangeries-pâtisseries, comme ceux de glacier, traiteur, tourier, confiseur et chocolatier, il a actuellement un avenir prometteur dans le secteur de l’hôtellerie restauration.
La mécanisation du métier, elle, a évoluée dans ces deux secteurs au fil des décennies, dans le secteur artisanal par exemple, on trouve très souvent des dresseuses, fonçeuses, laminoirs à bande, turbines multifonctions, tempéreuse et enrobeuse chocolat, bouleuses, panéotrads, divitrads, watercut etc…
La boulangerie artisanale joue également en France un rôle social, humain et culturel important, il n’est pas rare que des municipalités rurales œuvrent à sa réouverture.
Les tendances actuelles qui font son succès sont l’emploi du levain naturel, des farines biologiques moulues sur meule de pierre et des variétés anciennes de blé.
Comme dans notre société, les concepts bio, de commerce de proximité et des filières courtes ont le vent en poupe dans l’actualité, la boulangerie artisanale répond pleinement à ces exigences.
Le compagnonnage des Boulangers et des Pâtissiers du rite de Maître Jacques, perpétue les traditions, les coutumes et les devoirs répétés, interprétés, modifiés et transmis depuis plus de deux siècles. Notre société débute à la Toussaint deux mille onze en cette année de bicentenaire de notre existence. Il réunit dans le même idéal des compagnons Boulangers et des compagnons Pâtissiers du Devoir, soucieux de la pérennité de l’histoire du Compagnonnage des Boulangers et des Pâtissiers du Devoir.
Selon l’une des nombreuses légendes, les deux premiers compagnons boulangers, Nivernais Frappe d’abord et Montbard l’Inviolable, ont été reçus illégalement à Blois dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre 1811, par un compagnon Doleur nommé Bavarois Beau Désir.
Lors de la première moitié du 19eme siècle, les sociétés compagnonniques sont considérées comme perturbatrices de l’ordre public, elles vont jusque dans certaines régions être interdites et dans d’autres, sont tolérées…
Les compagnonnages de la boulangerie sont tout particulièrement surveillés, les grèves et coalitions qu’ils provoquent pouvant engendrer des pénuries de pain au sein de la population.
Il faut attendre 1850-1855 pour que cesse les luttes entre compagnonnages et entre l’état et les compagnonnages. Le 9 décembre 1860 a lieu la première reconnaissance par les compagnons tondeurs de drap, blanchers-chamoiseurs et cordonniers-bottiers des compagnons boulangers, comme faisant partie de la grande famille du Devoir. D’autres nombreux corps d’état du Devoir suivront au fil du temps…
Encouragées par Napoléon III, apparaissent les caisses de secours mutuels. C’est une aubaine pour les sociétés compagnonniques, une grande partie d’entre elles, dont les compagnons boulangers, vont se revêtir du titre légal de Société de Secours Mutuels.
Le congrès des compagnons boulangers du Devoir des 8 et 9 avril 1939 vote l’intégration du métier de pâtissier à son intitulé.
La société des compagnons boulangers et pâtissier du Devoir décide en son congrès de 1946 d’adhérer à la jeune Association Ouvrière des Compagnons du Devoir. Le développement des compagnons boulangers et pâtissiers du Devoir est à partir de ce jour considérable. Se met en place les premiers cours pratiques et technologiques destinés aux jeunes itinérants sur le Tour de France. Cette période de structuration est suivie de celle de la collaboration, avec par exemple l’école Nationale Supérieur de la Pâtisserie où de nombreux jeunes compagnons séjourneront pour parfaire leur connaissance auprès des plus grands noms du métier. En boulangerie, c’est au côté du Professeur Raymond Calvel que les jeunes boulangers découvriront en autres, les secrets et merveilles de l’autolyse et des pétrissages lents.
Ces travaux ont pour résultat, de nombreuses victoires en concours professionnels, des concours régionaux au titre suprême de Meilleur Ouvrier de France, dont le compagnonnage des boulangers et des pâtissiers est fier de revendiquer la présence dans ses rangs.
A partir des années 1995, il est constaté par de nombreux compagnons boulangers et pâtissiers du Devoir une perte d’identité de leur corps d’état. Cette constatation aboutit à la création en 2011 par ces compagnons de la Fédération des Compagnons Boulangers et Pâtissiers Restés Fidèles au Devoir.
En 2015, consciente qu’elle se doit d’apporter une structure d’accueil à sa jeunesse itinérante pour se développer, et après avoir été reconnue par la société des compagnons charpentiers des Devoirs, la Fédération qui devient Société des compagnons boulangers, pâtissiers restés fidèles au Devoir frappe à la porte de la Fédération Compagnonnique.
En bilan de ces sept années d’existence, nous nous sommes d’abord structurés en association 1901, la nationale regroupant sept associations régionales appelés « Cayenne ». Six en France et une en Suisse. Ses orientations et ses décisions sont prisent chaque année par une consultation générale, sur le principe d’un compagnon est égal à une voix.
L’effectif itinérant progresse chaque année, 12 en 2012, 17 en 2013 … pour actuellement compter 30 itinérants, le nombre des compagnons en règle est actuellement de 120 et une vingtaine de compagnons ont été « façonné ». Le tour de France compte actuellement 13 points de passage, 7 villes et 6 campagnes. Ces dernières étant chacune rattachée à une Cayenne.
Le recrutement s’adresse à tous les jeunes boulangers ou pâtissiers qui sortent de centre de formation avec un Certificat d’Aptitude Professionnel, âgés de 18 à 25 ans.
C’est un parcours diplômant et compagnonnique qui est proposé, sur mesure, dans de bonnes entreprises artisanales, tenues le plus souvent par des compagnons et/ou Meilleurs Ouvriers de France. Ils peuvent passer le Brevet Professionnel et le Brevet de Maîtrise pour les boulangers ou la mention complémentaire et le Brevet Technique des Métiers en Pâtisserie avec les chambres de métiers régionales tout au long de leur Tour de France qui comptent en général 5 à 6 points de passage, un par an.
La commission du Tour de France travaille à la construction de ces parcours adaptés et le collège des rites, lui, veille à la bonne transmission des savoirs compagnonniques. Les jeunes itinérants adoptés, le plus souvent la première année, sont appelés « aspirants ».
Les compagnons boulangers pâtissiers s’appellent entre eux par leur nom de région par exemple « Normand » et se nomment par un patronyme compagnonnique correspondant le plus souvent à un trait de caractère, par exemple « La Franchise ».
Notre priorité est d’offrir les meilleures conditions pour que l’évolution du jeune soit complète et adaptée. Pour nous, il n’y a pas trente-six formes du métier de boulanger, le boulanger est un artisan ! C’est le maître mot de nos métiers, notre identité de reconnaissance, fabriquer et créer de ses mains avec amour et passion des produits sains et frais par des connaissances et des savoir-faire référencés.
Ce choix exclusif de faire partie des acteurs du monde artisanal tombe sous le sens, imaginez une chaîne bien connu de fastfood formant des jeunes apprentis cuisiniers, ils ne recevraient pas dans ces entreprises, les connaissances et savoir-faire référencés dans la formation du métier de cuisinier.
Chaque métier à une histoire, des spécificités, certains se transforment, d’autres naissent, d’autres disparaissent. Les compagnons boulangers pâtissiers restés fidèles au Devoir et l’artisanat de la boulangerie-pâtisserie française n’ont pas l’intention de faire partie de ces derniers !
Un des facteurs clés de succès de notre modèle compagnonnique, est le placement prioritaire des jeunes chez des compagnons employeurs artisans. 24 de nos itinérants cette année sur 30, travaillent chez un compagnon artisan. Alternant vie en communauté dans une maison de la Fédération Compagnonnique et vie en « campagne » en appartement, tous nos jeunes sont passés par au moins une des six étapes dites « campagne » qui offre des expériences complémentaires et différentes.
Cette stratégie possède d’énormes avantages, le jeune itinérant reçois en plus d’un perfectionnement professionnel par le travail en entreprise, une retransmission compagnonnique de la part du compagnon employeur, ce dernier transmettant pleinement au jeune itinérant son savoir-faire et son savoir-être.
Notre société fonctionne par un modèle compagnonnique de perfectionnement où des professionnels compagnons retransmettent aux plus jeunes.
Compagnons et aspirant restés fidèles au Devoir : Compagnon Benoît Lefort, compagnon Laurent Bonneau, compagnon Jean-Luc Viennet MOF, compagnon Thièrry Meunier MOF, compagnon Laurent Lachenal et aspirant Alexandre Bouttier.
Nous entretenons d’excellentes relations avec les instances professionnelles artisanales, ainsi nos itinérants peuvent préparer dans les meilleures conditions leurs diplômes dans les centres régionaux de formation. Également comptant parmi nous, plusieurs Meilleurs Ouvriers de France boulangers et pâtissiers, nos excellentes relations avec cette institution nous permettent de les solliciter pour organiser des stages professionnels de grande qualité ou de placer nos jeunes dans leurs entreprises.
Soucieux de suivre le progrès technologique, nous avons mis en place cette année sur le net, une plateforme d’e-learning de cours technologique et de dossiers techniques interactifs de tous niveaux. Ainsi nos jeunes et tous nos membres peuvent parfaire leur culture professionnelle.
Notre objectif est de pérenniser nos stages professionnels de qualité. Nous étudions actuellement avec l’aide de la Fédération Compagnonnique, la rentabilité du projet d’un centre de formation à Bordeaux en 2023, afin de maîtriser pleinement notre engagement sur la voie de la formation.
Nous avons choisi cette année de mettre en place un compagnonnage différencié pour accueillir prochainement de jeune boulangère et pâtissières.
Pour que notre société prospère, nous allons augmenter régulièrement l’effectif de nos jeunes sur le tour de France de façon raisonnable et maîtrisée.
Nous avons pour objectif également d’ouvrir de nouveaux points de passage en respectant les trois points de vigilance essentiels, une bonne préparation avec projection dans l’avenir, de bonnes entreprises artisanales adaptées à la progression des jeunes et un bon encadrement de plusieurs compagnons sédentaires sur place. Correspondant avec l’implantation des maisons de la Fédération Compagnonnique et avec l’aide de celle-ci, Nantes et Avignon sont actuellement à l’étude.
Avec la participation de chaque compagnon sédentaire ou itinérant et l’optimisation de notre organisation, nous comptons atteindre ces objectifs. Participer et accompagner nos jeunes, nous avons tous cet idéal, retransmettre notre « Devoir » pour façonner des compagnons !
Laurent Bonneau, Normand la Fidélité, compagnon boulanger, président national.
Société des compagnons boulangers, pâtissiers restés fidèles au Devoir. Été 2019.
Merci beaucoup mon Pays pour cette article!
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Compagnon peintre vitrailliste du devoir du tour de France