Paris, 10eme Cayenne du tour de France ?
A Paris, en 1825, a lieu une première tentative d’ouverture d’une Cayenne de Compagnons boulangers. Le nomme DOZE fils, est signalé par une circulaire aux autorités comme suspecte d’organiser un compagnonnage parmi les ouvriers boulangers parisiens, il est visé par la même circulaire qui cite CAMOIN dit le mondin Provençal la Bonne Conduite– Compagnon boulanger du Devoir, reçu à l’ouverture et première réception de la Cayenne de Marseille, le jour de la Saint Honoré 1825.
Cette circulaire est loin d’inquiéter le préfet de police de Paris, qui vient dans un courrier adressé au ministre de l’intérieur , le 22 octobre 1825, exprimer sa confiance dans le calme des ouvriers boulangers :
« Votre excellence, m’ayant fait l’honneur de m’informer, par sa lettre du 27 aout dernier, que les garçons boulangers cherchaient a établir des associations clandestines sous le prétexte de se procurer des secours et des moyens de travail, j’ai fait exercer une surveillance spéciale a ce sujet dans le ressort de ma préfecture. Il résulte de divers rapports qui me sont parvenus jusqu’à ce jour qu’on n’a rien remarque d’extraordinaire dans la conduite comme dans les habitudes des garçons boulangers de la capitale. On assure qu’il ne s’est forme parmi eux aucune association particulière et que l’avis qu’ils ont eu de l’arrestation de quelques chefs de cabales dans le département a puissamment contribue a maintenir dans le devoir ceux qui auraient pu être tentes de les imiter.
Je fais prendre aussi des informations dans les communes rurales du ressort de ma préfecture, et des que le résultat m’en sera parvenu, j’aurai l’honneur de le communiquer a votre excellence, s’il présente quelque intérêt. »
En décembre 1825, celui-ci déchante ; le 5 janvier 1826, il écrit de nouveau au ministre de l’intérieur, mais ce n’est pas du tout le même son de cloche :
« Un certain nombre d’entre eux se sont réunis dans le courant du mois dernier et ont procède a la nomination d’un délégué qui, sous le nom de mère, est charge, au moyen d’une cotisation, de nourrir les garçons boulangers sans ouvrage et de s’entremettre pour leur en procurer. Cet agent est le sieur HANS, marchand de vin-traiteur, rue Etienne, n 7. J’ai prescrit une surveillance spéciale sur cette maison et j’ai charge le commissaire de police de tenir la main a l’exécution des articles 291 et suivants du code pénal, en ayant soin de constater les contraventions par des procès-verbaux, d’après lesquels il puisse être dirige des poursuites judiciaires contre les délinquants ».
Ces activités ouvrières aboutiront a l’ouverture de la 10eme Cayenne du tour de France, le jour de la Saint Honoré 1826, ainsi que par la réception de six compagnons :
Joseph BAYARD, Bordelais le divertissant
MOREL, Dauphine le Triomphant
CHATELET, Lyonnais la Victoire
Languedoc la Belle Conduite
Bugiste la Fidélité
Suisse Va Sans Crainte
Un cachet est mis en place par les Compagnons boulangers, afin de servir au marquage de la Marque secrète, qui atteste le passage du Compagnon dans la ville, il porte l’initiale P, correspondant à Paris, et le numéro 10, correspondant à l’ordre chronologique d’ouverture de toutes les cayennes des Compagnons boulangers.
Cachet de la cayenne de Paris, mis en service le jour de la Saint Honoré 1826
Mais étrangement, la 10eme Cayenne sera fermée très rapidement, sans qu’une seule réception face suite à cette première réception d’ouverture, nous ignorons à ce jour, la cause de la fermeture, mais un fait unique chez les Compagnons boulangers se présente, cette Cayenne perdra son numéro de naissance, alors que la pratique veut qu’un numéro est attribué à une Cayenne à perpétuité, que celle ci soit mise en sommeil et recouverte plusieurs fois, elle conserve le numéro qui lui est attribuée de sa première ouverture.
Malgré cette fermeture, le cachet P 10, restera en usage jusqu’en 1838 (date de la seconde ouverture) pour marquer les Marque Secrète des Compagnons boulangers de passage dans la capitale, les Compagnons de Paris, bien que n’étant plus Cayenne, ayant très certainement conserve une mère pour accueillir les Compagnons sur le trimard.
Cette réouverture est certainement le résultat des efforts voulut par les Compagnons boulangers afin de s’implanter dans la capitale, et pouvoir ainsi mieux traiter leur problème de reconnaissance, avec les autres corps du Devoir, dont la majorité on leurs « têtes » à Paris.
Marque secrète de Gascon le Soutien des Couleurs, reçu à Bordeaux à la Toussaint 1836, nous observons à l’angle supérieur de droite, le cachet d’Angers A 10, et à la base à droite, le cachet de Paris P 10, alors que cette Cayenne est en sommeil.
MS signé par Rennois Cœur de Roi, premier en ville ; Rochelais la Résistance, Second en ville ; Vivarais Va Sans Crainte, Rouleur.
(Arch. Compagnons boulangers pâtissiers AOCDD Bordeaux)
Cachet de la Cayenne d’Angers.
Il faudra attendre 12 ans, le jour de la Saint Honoré 1838, pour voir la renaissance de la Cayenne de Paris, qui portera un nouveau numéro, définitif cette fois , le 12 (les cayennes d’Angers et Toulouse s’étant ouverte entre temps, prendront respectivement les numéros 10 et 11).
Nouveau cachet de la ville de Paris, mis en service à partir de la saint Honoré 1838, avec le numéro 12.
A cette Saint Honore 1838 de réouverture, sont reçu :
Beaucaire le Triomphant
Provençal la Belle Conduite
Provençal Brin d’Amour
Laurent PRADAL, Montauban Fleur d’Orange
Manceau Bienfaisant
Bourbonnais Belle Rose
En 1848, la Cayenne de Nantes utilisera la même forme de cachet et, en 1861, ce modèle sera l’unique utilisé par l’ensemble des Cayenne du tour de France.
Cachet extrait de la premier page du « Grand livre » (registre des réceptions) des Compagnons boulangers du Devoir de la ville de Paris. Ce livre a été ouvert en 1838, date de la renaissance de la Cayenne de Paris, sous le numéro 12. Il a été appose l’ancien cachet de cette Cayenne, qui comporte le numéro 10, cela a été rectifié à la plume en apposant un numéro 12.
(Archives Compagnons du Devoir Boulangers Pâtissiers, Paris)
Pour conclure, voici le récapitulatif des différents cachets utilisés par la Cayenne de Paris, de sa naissance à nos jours :
De la Saint Honoré 1826 à la Saint Honoré 1838
De la Saint Honoré 1838 au 29 juillet 1979
Du 30 juillet 1979 à nos jours (a été rajouté «et pâtissiers »)
Rencontré très rarement vers 1875, inspiré du cachet de Lyon de l’époque.
Cachet administratif de 1920
Blois l’Ami du Travail , dans son ouvrage sur l’histoire des compagnons boulangers, attribuât le cachet P10, à la ville d’Angers, le numéro l’induisit en erreur, il s’agissait de Paris……
Laurent Bourcier, Picard la Fidélité C.P.R.F.A.D.