Le pain, il faut le faire, mais il faut bien souvent aussi le livrer!
Hubert Chiron, dans un des bulletins de « l’Amicale du Professeur Calvel» nous dit ceci :
« Des le milieu du XIX eme siècle les porteuses de pain vont s’inscrire dans le paysage matinal des quartiers parisiens. Le travail débute vers 5 heures du matin pour se terminer à 11 heures. En principe, seuls les petits pains de luxe et les pains fantaisies sont livres.
Il était admis qu’il fallait au moins une semaine a une porteuse pour mémoriser les adresses, les gouts et les exigences d’environ 300 clients. Une poussette servait a transporter le pain de la boulangerie a l’immeuble, puis il fallait s’armer de courage pour monter le pain au tablier jusqu’aux étages supérieurs.
Ce service gratuit périclita après la seconde guerre mondiale ».
Paru dans “Le Musée Universel” du 29 mars 1873 (Coll. Privée)
A Paris, 8ème arrondissement en 1905.
Pour le 1 janvier, la porteuse remettait à ses clients sa photographie, et recevait en échange ses étrennes. (coll. Privée)
Film « La porteuse de pain » en 1923, par René Le Somptier
Une belle porteuse de pain qui n’a pas l’air de laisser indiffèrent le client du rez-de-chaussée…
(gallica.bnf.fr)
“Le Paris Pittoresque”
La porteuse de Pain.
Elle est du peuple, elle est robuste,
Elle chemine sans plier,
Tendant son flanc, dressant son buste.
De grands pains plein son tablier.
L’hiver, la bise la flagelle ;
Le soleil la brule en été.
Que juin flambe ou que janvier gelé,
Elle va de son pas hâte.
Ses pieds en ont fait de ces marches
Sur les paves et les trottoirs.
Certes elle a monte des marches
Dans des escaliers clairs ou noirs.
Voila longtemps qu’elle travaille
Sans repos sans trêve et sans fin.
Dam il faut bien que la marmaille,
Boive à sa soif, mange à sa faim.
Et c’est pourquoi de porte en porte
Sans se plaindre du sort batard.
Pauvre et matineuse elle apporte,
La vie au riche dormand tard.
Elle est du peuple, elle est robuste,
Elle chemine sans plier,
Tendant son flanc, dressant son buste.
De grands pains plein son tablier.
Louis Marsolleau (vers 1890)
La porteuse de Pain -1882- par Jules Coutan (1848-1939)
Statue, plâtre (détail)
Modèle du bronze placé au square Saint-Jacques à Paris, détruit en 1942, expose au Petit Palais – Paris .
« La porteuse de pain », roman feuilleton de Xavier de Montépin (1823-1902), paru entre 1884 et 1889 (H.Geffroy éditeur, 222 Bd Saint Germain, Paris -Sources BNF-)
Jeanne Fortier, jeune veuve mère de deux enfants, gardienne de l’usine où son mari est mort dans l’explosion d’une machine, est accusée du meurtre du patron de l’usine, commis en fait par le contremaître Jacques Garaud qui s’enfuit aux États-Unis où il fait fortune. Condamnée à perpétuité, Jeanne s’évade au bout de 20 ans, retrouve ses enfants et gagne sa vie comme porteuse de pain, mais l’histoire se poursuit à la génération suivante, la fille de Jeanne, Lucie, étant courtisée par le fils de la victime, Lucien, qui est lui-même poursuivi par les assiduités de la fille du meurtrier, chacun ignorant bien sûr la véritable identité de l’autre jusqu’au coup de théâtre final, quand le meurtrier revenu en France sous les traits d’un riche homme d’affaires américain est enfin démasqué (source : http://www.lesamisdulouxor.fr/)
« La Porteuse de pain » sera joue dans plusieurs théâtres mais aussi présente sur le grand écran : en 1906, réalise par Louis Feuillade ; en 1912 par Georges Denola.
En 1923, par René Le Somptier, Jeanne Fortier était incarnée par Suzanne Desprès (1875-1951).
En 1934 par René Sti, avec Fernandel et Germaine Dermoz.
En 1950 par Maurice Cloche, en italien.
En 1963 par Maurice Cloche, avec Jean Rochefort, Suzanne Flon et Philippe Noiret.
En 1973, un feuilleton télévisé en 13 épisodes de 26 minutes de Marcel Camus.
(Coll. L.Bourcier)
Différents types de porteuses de pain
Equipe de porteuses de pain, 69 avenue Marceau Paris Boulangerie-pâtisserie Josephine , Maison Bardonneau
Suisse, porteuse de pain, 1904
Paris
Boulangerie Bernardeau, Courbevoie
Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D.
Après avoir vu sur Arte le documentaire « Devanture : Flâner à travers la Belle Époque » où il est notamment évoqué le métier de boulangerie et par extension des porteuses de pain (cela m’a rappelé la statue de Jules Coutan vu au Petit Palais que j’aime beaucoup (et dont vous en parlez), où le tablier de la boulangère m’intrigue et aimerais bien reproduire), je suis tombée sur votre article très intéressant et bien documenté. Je vous remercie de nous faire partager votre travail et de mettre en lumière un petit métier dont je ne soupçonnais même pas de cette époque révolue.