Restés Fidèles au Devoir en 1880

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L’origine de « R.F.A.D. »  (Resté Fidèle Au Devoir) , intitulé de l’actuelle Société de Compagnons Boulangers et Pâtissiers remonte à 1880.

En effet, remontons un peu le temps et observons rapidement le paysage Compagnonnique au milieu du 19e siècle. Nous voyons apparaitre des sociétés d’anciens Compagnons réunis, ces sociétés régionales, rassemblent dans les villes, les départements, des compagnons de différents corps d’états, ayant fait leur tour de France. Les statuts de ces sociétés sont généralement déposés en préfecture sous le nom de société mutualiste (assistance maladie, frais d’enterrement, indemnité de veuvage, etc.). En 1874 naquit la Fédération Compagnonnique de tous les Devoirs réunis, qui a pour but de fédérer au niveau national l’ensemble de ces sociétés régionales. Elles acceptent dans ces rangs des Compagnons de tous Devoirs sans distinction, ce qui n’est pas du goût de la totalité des compagnons, en effet une partie des Compagnons du Devoir, refusent de côtoyer les Compagnons du Devoir de Liberté, qu’ils considèrent comme compagnonnage illégitime.

Face à l’engouement de nombreux Compagnons à s’inscrire à la Fédération Compagnonnique de tous les devoirs réunis (cette nouvelle société présentant de nombreux avantages mutualistes), des Compagnons du devoir décide de créer en 1880, eux aussi une société de secours mutuels nationale. Cette société prendra le nom de « Ralliement des Compagnons Restés Fidèles au Devoir ».

C’est la première apparition de cette intitulé « FIDÈLE AU DEVOIR »

En 1889, en congrès a Paris, la Fédération Compagnonnique des Devoirs Réunis, change de nom et adopte celui de « Union Compagnonnique des Devoirs Unis ». Cette société décide de rompre avec le corporatisme et unifie les rites de réception.

De nombreux membres du Ralliement des Compagnons Restés Fidèles au Devoir se déchainent, a travers les pages du journal « Le Ralliement » contre l’Union Compagnonnique et sa décision d’unifier les rites, le Ralliement défend l’identité corporative selon les traditions ancestrales.

Nous retrouvons une deuxième fois l’utilisation de  « Resté Fidèle au Devoir » , c’est en 1922, chez les Compagnons Boulangers du Devoir dit les Enfants de la Vérité. Nouvelle société née d’une scission dont l’un des membres fondateurs est Francois Magnan Angoumois l’Exemple de la Justice. Cette société souhaite ouvrir les portes du compagnonnage aux Pâtissiers, Charcutiers, Meuniers et Cuisiniers, et veut défendre les valeurs du Compagnonnage traditionnel, face a un Compagnonnage Parisien des boulangers fortement syndicaliste où il est souvent question de lutte de classe… Cette société sera active une dizaine d’années et s’éteindra, ses membres seront intégrés à la Société des Compagnons Boulangers du Devoir (amnistie).

Voici un article de presse paru en 1922, rencontre entre un journaliste et des Compagnons Boulangers du Devoir dit « Les Enfants de la Vérité » diffusé dans le journal « L’intransigeant », le 2 novembre 1922 :

« Les Compagnons du tour de France »

Il s’agit du tour de France à pied…

Les compagnons du tour de France déposent une palme, aujourd’hui, au Père Lachaise sur la tombe d’Agricol Perdiguier, dit Avignonais la Vertu.

Les compagnons ? Où les voir ? Car le temps n’est plus où, en les rencontrant sur la route, on pouvait leur dire : « Enfin, je vous trouve chez vous ! »

Heureusement, nombre d’entre eux, amis ou adversaires, se réclament de Jacques de Molay, qu’ils nomment Maitre Jacques ou Jacques Bourguignon, Duc de Molay et qui fut le dernier Grand Maitre des Templiers.

Où voir les compagnons ? Parbleu, dans le quartier du Temple, et même par surcroit de certitude, rue du Temple ou rue des Fontaines du Temple !

Ceux que j’ai interrogés ont leur siège dans cette dernière rue, au fond d’un café dont la patronne est leur « mère ». Ils s’intitulent « Compagnons boulangers et assimilés restés fidèles au devoir », et constitue une société séparée, d’origine toute récente, première preuve de la vivacité de la foi compagnonnique.

Il y a là le « premier en ville » ou président, le « rouleur » ou secrétaire, trésorier, maître de cérémonies, ainsi que de divers compagnons. Ces boulangers aux millénaires traditions vont-ils me parler de Jacob, disant à son huitième fils, inventeur je suppose du pain Azyme : « Azer, ton pain sera bon et fera les délices des Rois » ? Non, nous voici tout de suite de plain-pied dans le présent.

Nous avons 17 sièges en France, dans des grandes villes. Nous comptons 350 adhérents. Ils se repartissent, vous le savez en aspirants, jeunes compagnons, compagnons reçus et compagnons initiés. Ils sont ouvriers ou patrons, syndiqués ou non, rouges ou jaunes, patrons et ouvriers se respectent réciproquement. Nul esprit de classe : Des Compagnons !

Nous prenons les jeunes gens a 16 ans. Aucune cotisation tant qu’ils ne gagnent pas d’argent. Nous aidons les compagnons quand ils voyagent. Ils ont droit de manger gratuitement pendant deux jours dans chaque ville où ils cherchent du travail. Mais le cas ne se produit plus en ce moment, puisque nous n’avons aucun « flâneurs » et manquons au contraire de quatre ou cinq hommes par jour pour faire face aux demandes des employeurs.

« Nous avons encore nos cannes, nos couleurs. Mais le temps n’est plus où nous voyagions à pied principalement. »

-En 80, interrompit Vendéen la Chaine d’Alliance *(un patron-compagnon qui va se retirer après fortune faite), en 80 je suis parti à pied de Paris pour Dijon avec deux sous que j’ai dépensé à Vincennes pour acheter une boite d’allumettes. Aujourd’hui, il est plus économique de voyager en chemin de fer.

-Et pourquoi continuer à faire le tour de France ? Repris-je.

-Pour apprendre son métier. Ah ! Vous croyez que le pain de Paris est le meilleur de France ! C’est une erreur. Sauf chez les petits patrons, il est trop vite travaillé. D’une manière générale, celui de Rochefort, Toulon, Marseille, Bordeaux lui est préférable.

-Et puis voyager, n’est-ce pas la meilleure façon de nous connaitre entre nous, de nous juger, de nous apprécier et, par là, de nous entraider efficacement ?

Un des nôtres , patrons boulanger à Rochefort, nous écrivait un jour : « Pays, je vais me retirer. Trouvez-moi un bon compagnon, je lui céderai mon fond le même prix que je l’ai payé. » Un bon fond Monsieur ! Trois fournées en hiver, neuf a dix en été. Et nous savions aussi que, l’ayant installé lui-même, il n’avait eu à en payer que l’aménagement. Riche affaire par conséquent.

Nous connaissions dans la région le compagnon-ouvrier Rochelle-Vendéen, marié depuis deux ans. Nous l’avons informé de la chose. « Arrange-toi avec lui ! » Pour quelques sous, le marché a été conclu . Et ce cas n’est pas une exception.

Se douterait-on que Comtois Bon Courage, compagnon boulanger, dirigeant aujourd’hui un grand magasin de la rue de Rivoli est licencié en droit ? Licencié en droit, aussi Grelot, 90 ans, dit l’Angevin l’Ami des Cœurs, boulanger depuis son enfance dans les environs de Saumur et dont le fils et le petit fils continuent la profession, Saumur Bon Accord, 60 ans, dont le fils a repris le fond de boulangerie !

Cela vous étonne ? Vous ignorez sans doute aussi qu’un certain boulanger de la Place Clichy, qui n’est pas des nôtres, il est vrai, sort de Polytechnique et fut colonel pendant la guerre ? »

En rentrant chez moi, je relus « Le tonnelier de Nuremberg ».

Andre Laphin

*note de Picard la Fidélité : Trichereau Alexandre, Vendéen la Chaine d’Alliance, reçu à Nantes Saint Honoré 1882.

Si, lecteurs, vous vous promenez un jour dans le vieux Tours, vous pourrez observer ces quatre lettres RFAD, sur la partie inférieure du portail (1960) de l’Alliance Compagnonnique de Tours, située place des Halles, l’Alliance Compagnonnique étant à son origine composée uniquement de corporations « Restés Fidèles Au Devoir ».

Nous observons, dans cette rapide présentation, que le sigle R.F.A.D. est en rapport direct avec la protection des traditions Compagnonniques, contre l’uniformité du paysage compagnonnique et contre les voies empruntées qui peuvent amener à la disparition de l’identité et l’indépendance corporative.

Ce sont là les raisons qui ont menés des Compagnons Boulangers et Pâtissiers du Devoir à fonder, en mai 2011, une nouvelle société, qui s’intitule fièrement « Fédération des Compagnons Boulangers et Pâtissiers Restés Fidèles au Devoir ».
pieceblason

Bourcier Laurent Picard la Fidélité Compagnon Pâtissier Resté Fidèle au Devoir.

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