Règlement de 1846

À son arrivée chez la Mère, le compagnon, après les reconnaissances et les bienvenues d’usage, doit lire et accepter le règlement en vigueur, accroché sur l’un des murs du bistrot ou de la salle à manger. Ces règlements sont de belles pièces d’art populaire, généralement réalisées par un compagnon et ont l’avantage, pour les historiens, de représenter, par leurs contenus, l’état d’esprit du moment. Nous ne possédons pas d’éléments qui nous permettent de définir la période d’apparition de ces règlements, mais nous pouvons supposer qu’ils étaient utilisés, avant la naissance des compagnons boulangers, par les sociétaires qui les avaient précédés.

Sur les sept règlements de compagnons boulangers du Devoir que nous connaissons aujourd’hui, six sont en très bon état, ce sont ceux des Cayennes de Saumur, Tours, Troyes, La Rochelle et des villes de 2ᵉ ordre, Fontenay-le-Comte et Cognac, un septième règlement, celui de la Cayenne de Nîmes, est en très mauvais état, bien qu’il soit conservé sous-verre.

RÈGLEMENT DE LA CAYENNE DE SAUMUR, 1846

(Conservé au Musée du Compagnonnage de Tours.)

GLOIRE À DIEU – HONNEUR AUX COMPAGNONS RÈGLEMENT DE LA SOCIÉTÉ

Art. 1 – Tout ouvrier, compagnon ou aspirant qui, en entrant, ne saluera pas la Mère, sera à l’amende d’une bouteille de vin.

Art. 2 – Tout compagnon ou aspirant qui appellera la Mère « Madame » et le Père « Monsieur » sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 3 – Tout compagnon ou aspirant qui s’assoira sur les tables ou meubles sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 4 – Tous ouvriers qui entre eux se donneront un surnom seront à l’amende d’une bouteille

Art. 5 – Tout aspirant qui tutoiera un compagnon sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 6 – Tout compagnon ou aspirant qui ne se rendra pas deux fois par semaine chez la Mère sera à l’amende de 1 franc s’il ne donne pas de bonne raison des causes qui lui en ont empêché.

Art. 7 – Tout compagnon ou aspirant qui se couchera sur les lits pendant le jour sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 8 – Tout compagnon ou aspirant qui se rendra chez la Mère après quatre heures sans travailler, avec son tablier ou les bras nus, sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 9 – Tous compagnons ou aspirants qui feront des jeux de mains chez la Mère seront à l’amende d’une bouteille.

Art. 10 – Tout comp∴ ou asp∴ qui montera en chambre le jour de l’assemblée sans avoir des bas et qui ne restera pas la tête découverte tout le temps de l’assemblée sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 11 – Tout compagnon ou aspirant qui se disputera chez la Mère sera à l’amende d’une bouteille ; mais s’il y a des coups de portés, à l’amende de 3 francs.

Art. 12 – Tout compagnon ou aspirant qui lira le règlement le chapeau sur la tête sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 13 – Tout ouvrier qui touchera la canne d’un compagnon ailleurs que par l’embout sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 14 – Tout compagnon ou aspirant qui mangera chez la Mère sans se laver les mains sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 15 – Tout compagnon ou aspirant qui jouera de l’argent chez la Mère sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 16 – Tout compagnon ou aspirant qui en décoiffera un autre sera à l’amende d’une bouteille ; il en sera de même de celui qui fumera étant assis à la table ou chantera des chansons de compagnons.

Art. 17 – Tout compagnon ou aspirant qui allumera sa pipe à la chandelle sera à l’amende d’une bouteille ; il en sera de même de celui qui l’éteindra et la fera allumer par un autre.

Art. 18 – Celui qui chantera des chansons malhonnêtes sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 19 – Tous compagnons qui entre eux s’appelleront « Monsieur » seront à l’amende d’une bouteille.

Art. 20 – Tout compagnon ou aspirant qui trinquera avec celui qui est à l’amende et qui boira avant lui (à moins qu’il y ait 5 minutes que le vin soit dans les verres) et avant de boire ne dira pas « A la santé de l’amende et de celui qui la paye » en se découvrant la tête, sera à l’amende d’une bouteille.

Ceux qui refuseront de payer l’amende qu’ils auront méritée y seront du double ; s’ils ne le veulent pas, ils seront chassés.

Art. 21 – Tout compagnon ou aspirant qui fumera en chambre sera à l’amende d’une bouteille ; il en sera de même de ceux qui jureront ou qui tiendront une conversation malhonnête.

Art. 22 – Tout compagnon ou aspirant qui mettra son chapeau sur la table sera à l’amende d’une bouteille.

Art. 23 – Tout compagnon ou aspirant qui lâchera des rots ou qui fera entendre des vents sera à l’amende d’une bouteille.

Saumur, le 15 août 1846

Fait par Ouvrard Louis, natif de Saumur dépt de Maine-et-Loire reçu compagnon boulanger à La Rochelle pour l’Assomption le 15 août 1842 sous le nom de Saumur le Génie du Devoir à l’âge de 21 ans.

 

Extrait du livre « Le pain des Compagnons » L’histoires des compagnons boulangers et pâtissiers

Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D.

Envoyer un commentaire concernant : "Règlement de 1846"