LOUIS-PHILIPPE EN PAIN D’ÉPICES (1833)
Les journaux satiriques d’aujourd’hui ne ménagent pas les hommes politiques de tous bords, l’armée, les religieux de toutes confessions, car la presse a acquis une liberté qu’elle a conquis au prix fort.
Au XIXe siècle, sous Louis-Philippe (1830-1848), il n’en était pas de même. Si la charte de la nouvelle monarchie constitutionnelle instituait la liberté de la presse et l’abolition de la censure, dans les faits les procès se multiplièrent contre les caricaturistes. On connaît les fameuses « Poires » du dessinateur Philipon, représentant le roi sous la forme du fruit, et les dessins féroces de Daumier. Devant l’essor des idées républicaines, la loi sur la presse de septembre 1835 finit par instituer comme un délit « l’offense au roi, lorsqu’elle a pour but d’exciter à la haine ou au mépris de sa puissance et de son autorité constitutionnelle ».
C’est deux ans avant cette loi que fut diffusée l’image ci-dessous.
Elle est intitulée « Exposition publique – 1833 » et légendée « Modèle colossal de pain d’épices ».
Cette lithographie est signée de Becquet, rue Fursteberg, n° 6 et se vendait à Paris, chez Aubert, galerie Véro-Dodat, célèbre marchand d’estampes de l’époque.
Il s’agit d’une caricature du roi Louis-Philippe, présenté sur un cheval, couronne sur la tête, une main sur le cœur et présentant d’une autre la fameuse charte à-demi déroulée.
Au premier abord, quoi de caricatural dans cette image, qui, sous forme de bas-relief, pourrait orner n’importe quel bâtiment public ? Précisément du fait qu’il ne s’agit pas d’une sculpture mais d’un « modèle colossal en pain d’épices ». La satire consiste à présenter le roi comme un ridicule pain d’épices sans consistance, une figurine vendue aux enfants dans les foires et donc qui n’a rien soi de « colossal ». Le roi Louis-Philippe devient ainsi un joujou, une friandise de quatre sous, un pantin comestible…
Sur le caractère dérisoire des personnages en pain d’épice, voir l’article Histoire d’un pain d’épice publié sur ce site le 13 mai 2020.
Laurent BASTARD