La canne 2/3

L’une des plus anciennes attestations d’un bâton associé à une cérémonie compagnonnique figure dans la célèbre Résolution de la Sorbonne (1655) concernant la réception des compagnons chapeliers. Cette mention est confirmée par un autre texte de 1674, concernant un procès intenté aux mêmes chapeliers à Genève.

Il est indiqué que le prévôt, qui représente Pilate, « tient en sa main une baguette qui représente l’innocence de Notre Seigneur ». Nous observons là un symbole d’autorité.

D’ailleurs, Laurent Bastard nous communique, sur le site du Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton, un article intitulé « La canne du majordome » :

< Cannes de compagnons boulangers du Devoir, nous observons les différentes pommes et embouts. Cayenne de Paris, 2000.

Jusqu’à la fin du XIXe siècle, certaines familles princières ou bourgeoises disposant d’un grand nombre de gens de maison, avaient conservé les usages de l’Ancien Régime.

Ainsi se dotaient-elles d’un majordome, chargé de diriger le personnel et de transmettre les ordres du maître de maison.

Il était quelquefois vêtu à l’ancienne, en livrée, culotte et bas, costume brodé et galonné, comme un suisse d’église. Son autorité était symbolisée par une canne à gros pommeau, comme le montre la gravure, extraite du roman Le Prince Virgule de Paul d’Ivoi (1856-1915) publié en feuilleton dans le Journal des voyages (numéro du 29 janvier 1905).

Plusieurs pratiques ont dû influencer, inspirer simultanément les compagnons sur le choix de cette canne de rouleur, une influence militaire avec les cannes de tambours-majors, les cannes de Suisses…

La canne de rouleur des compagnons boulangers est ornée de rubans rouges et blancs, excepté pour les cérémonies de deuil où elle est entourée de rubans noirs et blancs.

La canne de compagnon boulanger, anatomie et évolution

Les plus anciennes cannes de compagnons connues ne peuvent être datées que du début du XIXe siècle.

Des collections publiques ou privées renferment peut-être des cannes compagnonniques plus anciennes, mais la simplicité de leur forme et l’absence de blason de métier ou de nom de compagnon ne permet pas de les identifier comme telles.

Il faut donc attendre les premières années du XIXe siècle pour découvrir des cannes dont on sait par ailleurs qu’elles ont appartenu à des compagnons.

Quelles en sont alors les composantes et caractéristiques ?

La pomme : Vient du vieux français pom qui désignait jadis la poignée de l’épée, devenue pomme puis pommeau, le mot s’est par la suite rapporté plus particulièrement à la petite boule terminant la poignée de l’épée ou du sabre.

Les compagnons boulangers ont conservé la dénomination pomme, elle est sphérique et constituée d’ivoire.

< Canne à pomme neutre antérieure à 1850.

L’ivoire était un produit très utilisé au XIXe siècle pour une multitude d’objets :

En ébénisterie, en tabletterie, pour confectionner des bijoux, des boules de billard, des statuettes religieuses ou profanes, des touches de piano, des crosses d’évêques, des pièces de jeux et des pommes de cannes !

Les tonnages importés étaient considérables, dans les années 1920, le port d’Anvers recevait chaque année 45 000 défenses d’éléphants.

Jusqu’en 1840, les pommes de cannes de boulangers ne sont pas gravées du blason du métier ou/et du nom compagnonnique de leurs propriétaires, d’où la difficulté d’identifier une canne de boulanger avant cette date. (Situation identique pour les cannes de l’ensemble des compagnonnages de cette époque.)

Ultérieurement coexistent, toutes sortes de blasons plus ou moins complexes, gravés sur la pomme et accompagnés de monogrammes. Chaque compagnon, en l’absence de règles précises, choisissait de faire porter tel ou tel ensemble de lettres et motifs sur le sommet de sa pomme.

Parfois aussi, il semble que ce soit par méconnaissance des symboles de sa société ou pour des raisons d’économie, qu’un compagnon dérogeait aux usages de son compagnonnage.

Nous constatons une évolution constante de ces gravures, à travers lesquelles nous pouvons ressentir l’idéologie dominante aux différentes époques, la canne étant à l’image de celui qui la porte et de la société à laquelle il appartient, comme l’outil est à l’image de l’ouvrier qui l’utilise, le chien à l’image de son maître.

À partir de 1920, apparaissent des pommes légèrement planes à leurs sommet, et aujourd’hui entièrement plates afin de faciliter la gravure mécanique. Gravure comportant le nom de compagnon du propriétaire, un symbole compagnonnique, et parfois la date et le lieu de réception.

Jean Francois Hamel, Île de France le Soutien de la Canne, reçu à Paris à la Saint-Honoré 1995. Pomme réalisée en 2012, suite à son intégration à la Fédération des Compagnons boulangers et pâtissiers restés fidèles au Devoir en 2011. Pelle et rouable croisés, balance en suspend, treize épis de blé, ruche. sigles L∴ J∴ B∴ S∴ F∴ P∴ V∴, au centre R∴F∴A∴D∴ Dessin de Laurent Bonneau, Normand la Fidélité.

Le fût : Le bois employé dans la confection du fût est du jonc de Malacca qui, comme son nom l’indique, vient de la presqu’île de Malacca, en Indonésie.

Mais comme son nom ne l’indique pas, ce jonc n’est pas un jonc mais un rotin. Un peu orange et légèrement moucheté, c’est un matériau très employé pour les cannes bourgeoises au XIXe siècle.

Cette variété de rotin est une lianes à tiges noueuses – formée d’une succession de nœuds -, pouvant atteindre des dimensions considérables, cent, deux cents, voire trois cents mètres.

Parmi les plus beaux rotins sont sélectionnés ceux servant à la fabrication des cannes. C’est un matériau souple et très flexible, malgré sa rigidité à supporter l’appui du corps.

Pour confectionner le fût, des tronçons de rotin sans nœuds sont nécessaires.

L’embout : Il est composé pour l’ensemble des compagnonnages de deux ou trois parties, en cuivre, en laiton ou en acier nickelé, et terminé à sa base par une partie d’acier – métal plus résistant à l’usure au contact du sol/ que le laiton – nommée pièce d’usure, représentant généralement un gland de chêne.

Jusqu’en 1880, les embouts sont de conception assez simple. Nous voyons ensuite apparaître des embouts ouvragés : Frises, facettes, puis ensuite de nombreux symboles : Équerre, compas, bonne foi, ruche, chien.

L’on peut rencontrer des embouts ornés des outils du métier de son propriétaire, mais cela est très rare dans l’ensemble des compagnonnages.

De 1900 à 1939, nous trouvons des cannes à multi-embouts, c’est-à-dire que le compagnon disposait d’une canne complète de grande taille, dite canne de rouleur ou canne de cérémonie, mais, une fois l’embout dévissé, la canne devenait ainsi de taille plus modeste, et prenait l’appellation de canne de marche.

Au sein de l’Association Ouvrière des Compagnons du Devoir apparaissent des embouts communs à tous ses compagnonnages, en laiton, lourd, massif, ne comportant aucun symbole.

À partir de 2000, les compagnons boulangers du Devoir décident d’y ajouter deux symboles, équerre et compas entrecroisés, placés au milieu d’une couronne de laurier, portant à son sommet l’inscription Travail, puis y ajoutent aussi quelques éléments décoratifs.

Les œilletons : Sont en argent ou en ivoire au XIXe siècle. Il est important de signaler que ce n’est pas parce qu’une canne possède des œilletons et une pomme en ivoire que c’est une canne de compagnon boulanger. En effet une partie importante de cannes bourgeoises, au XIXe siècle, étaient percées dans la partie supérieure du fût afin de passer un cordon qui servait soit de décor, soit pour y passer le poignet pour éviter à la canne de tomber au sol de façon malencontreuse. Nous trouvons des œilletons entièrement incrustés dans le fût, d’autres avec une bague extérieure qui est quelquefois ciselée. À partir de 1950, ils seront en métal cuivré.

Le cordon : Il est très difficile de retracer son évolution. La plus ancienne description du cordon de la canne d’un compagnon boulanger que nous connaissons à ce jour, se trouve dans l’interrogatoire de Pierre Sere, Tourangeau l’Ami du Devoir, par la police de Tours le 1er juillet 1820.

À la suite d’une rixe survenue entre compagnons maréchaux, charrons, et boulangers, Tourangeau l’Ami du Devoir reconnaît posséder une grande « canne à pomme d’ivoire, galon et gland de cuir, avec un bout de cuivre au bout ». Il n’est pas question de cordon en tissu, mais de cuir (A.D. 37) et rien ne dit que celui-ci recouvre l’ensemble du fût de la canne, comme cela se pratique de nos jours.

Par contre, connaissant les similitudes entre les pratiques des compagnons cordonniers et boulangers au XIXe siècle, il me paraît opportun de relever un très court passage de l’ouvrage du compagnon bottier du Devoir Toussaint Guillaumou, intitulé Les confessions d’un compagnon (Confessions d’un Compagnon (1864), réédition 1996, éditeur J. Grancher, 1996 ; page 243.) au sujet de la reconnaissance de son compagnonnage par celui des tondeurs de draps :

« […] notre canne qui jusqu’alors avait été nue, fut garnie du lien qui symbolise l’alliance des compagnons. Je ne vois pas jusqu’à quel point nous ne pouvions pas, avant cette reconnaissance, porter nos couleurs à gauche et mettre un cordon à notre canne, et quelle plus grande guerre les corps auraient pu nous faire pour cela. »

Cette reconnaissance par les tondeurs de draps datant de 1850 nous pouvons fortement supposer qu’il en était de même pour les compagnons boulangers.

Sur les lithographies d’Agricol Perdiguier Le Compagnonnage Illustré et La Réconciliation des compagnons, nous observons le compagnon boulanger du Devoir, Premier en ville, avec une canne possédant un cordon court et rien ne nous permet d’affirmer que celui-ci ait été réalisé en tissu.

Il est fait allusion au cordon (en soie) dans la constitution des compagnons boulangers du Devoir de 1860, mais pas à sa longueur. Les premiers documents photographiques datant de 1880-1890, nous montrent des cannes possédant un cordon qui s’entrecroise tout le long du jonc, jusqu’à l’embout, comme cela est encore le cas de nos jours.

Nous constatons une augmentation de la dimension des glands jusqu’en 1910 environ, qui ensuite diminueront progressivement, jusqu’à la longueur actuelle qui est beaucoup plus raisonnable, proportionnée et harmonieuse avec l’ensemble de la canne.

La taille : La longueur de la canne demeure très variable. Les lithographies éditées par Agricol Perdiguier, nous montrent des cannes relativement petites, d’environ 1 mètre, du type canne bourgeoise. D’autres images nous montrent des compagnons portant une canne beaucoup plus grande, qui atteint la poitrine.

Dans Le Livre du Compagnonnage, Perdiguier écrit : « Tous les compagnons portent des cannes : Dans certaines sociétés on les porte courtes, ce sont des cannes quelque peu pacifiques ; dans d’autres, on les porte longues et garnies de fer et de cuivre, ce sont alors des cannes guerrières, des instruments de bataille. » Les compagnons porteurs de cannes de combat auraient été baptisés grosse cavalerie par opposition aux porteurs de cannes fines dits chevaux de parade.

Les règles internes aux sociétés concernant les dimensions de la canne varient selon les corporations, tout en restant assez floues. Il semblerait qu’il n’existe pas de règlement particulier au XVIIIe siècle pour les compagnonnages, et que ce n’est qu’à partir du parrainage de nouveaux métiers au siècle suivant par des compagnonnages du Devoir, qu’apparaissent dans les règlements des tailles imposées.

« Constitution donnée par les Compagnons Selliers-Carrossiers du Devoir à leurs enfants les Compagnons Tisseurs Ferrandiniers du Devoir, le 31 octobre 1841.
Art.1 : Tout Compagnon Tisseur-Ferrandinier devra, sur le T∴D∴F∴ porter une canne à hauteur d’hanche de celui qui la porte ou plus basse si cela lui convient, et aucune ne pourra dépasser cette règle par nous établie.»

Nous trouvons aussi dans la constitution donnée par les compagnons tondeurs de drap du Devoir le 10 novembre 1850 aux compagnons cordonniers bottiers du Devoir, à l’article 6 :
« Ils porteront [les Compagnons cordonniers-bottiers] la canne en jonc de 1 mètre en plus de la longueur de l’embout en cuivre, pomme noire, cordons de soie ».

Il en fut de même lorsque les boulangers reçurent en 1860 leur constitution des compagnons cordonniers, tondeurs et blanchers-chamoiseurs du Devoir :
« Article 9 : les compagnons boulangers du Devoir porteront à l’avenir une canne de jonc et pomme blanche en ivoire, yeux en ivoire et un cordon de soie, la canne ayant un mètre de longueur embout compris, à partir du jour de notre reconnaissance pour tous compagnons sans distinction. »

Les anciennes sociétés conservent donc l’usage de la canne longue, mais celles-ci imposent une canne courte aux nouvelles sociétés, cela pour deux raisons :

  1. La soumission du compagnonnage qui est reconnu à celui qui le reconnaît. On observe la même pratique que pour le port des couleurs à la boutonnière : Le compagnonnage reconnu devant porter les couleurs à une boutonnière en dessous de ceux qui reconnaissent.
  2. La volonté d’imposer des relations pacifiques entre nouveaux corps d’état reconnus du compagnonnage du Devoir.

< Compagnon boulanger du Devoir portant une couleur de Sainte-Baume, bouquet d’immortelles et une canne courte.

La canne sera rognée !

Voici un extrait du procès-verbal, daté du 15 décembre 1861, scellant l’accord passé entre les compagnons boulangers du Devoir de « Blois Fondation », représentés par Constant Boutin, Saumur Plein d’Honneur, Premier en ville de la cayenne de Paris et Beauceron Va de Bon Cœur, compagnon blancher-chamoiseur, délégué par les trois corps signataires de la reconnaissance du 9 décembre 1860 qui sont convenus des modifications suivantes :

[…] Art 49 : Pour la longueur des cannes à partir de ce jour (15 dé- cembre 1861) tout compagnon faisant l’achat d’une canne, la longueur ne devra pas dépasser un mètre à un mètre cinq centimètres, grand embout compris, sous peine qu’à la première ville où il arrivera, on devra la lui rogner.
En modification et ajout à cet article 49 du règlement, approuvé en assemblée générale par la grande majorité des 20 cayennes composant le Tour de France, chacune en leur chambre respective du 10 février au 27 avril 1861 (tour des villes par Saumur Plein d’Honneur) :
« Les compagnons boulangers du Devoir porteront à l’avenir la canne de jonc d’un mètre de longueur embout compris, pomme blanche en ivoire, yeux en ivoire, cordon en soie noire, car le symbole étant tout pacifique, et le principe ne commandant que le bien, il est ridicule et inopportun de porter des grandes cannes qui représentent un caractère agressif et ne font pas honneur aux compagnons qui les portent ». […]

Ce règlement concerne uniquement les compagnons reçus après cette date, les compagnons reçus antérieurement ne changeront pas de canne. Nous ignorons si cette mesure disciplinaire de rogner la canne fut mise en application, mais dans tous les cas, elle devait être une force de dissuasion à l’égard des nostalgiques des bâtons de grande dimension ou bâton de longueur.

Sur le site internet du Centre de Recherche sur la Canne et le Bâton, voici un extrait de l’article écrit par Laurent Bastard, le 20 novembre 2012, intitulé « Plus de bâton de longueur » :
« Notre arrière-grand-père, compagnon tanneur du Devoir, écrivait vers 1868, parmi une liste de réformes souhaitables : (Il faut) supprimer la canne de longueur, ne porter qu’une canne de 1m 10 centimètres.
C’était à cette époque une demande pressante des compagnons progressistes et pacifiques, qui voulaient mettre fin aux rixes entre membres de sociétés ennemies et apparaître aux yeux des autorités comme des ouvriers observant les lois. De petites cannes, voire plus de cannes du tout, était le vœu des compagnons les plus réformistes de la fin du XIXe siècle, ceux qui militèrent dans la Fédération compagnonnique de tous les Devoirs réunis (1874) puis dans l’Union Compagnonnique (1889).
En 1859, le compagnon boulanger Louis Pierre Journolleau publia son recueil intitulé L’Innovateur – Recueil de chansons nouvelles dédiées à tous les compagnons du Tour de France indistinctement, qui fut réédité en 1870 et en 1907 (à titre posthume). » (Une troisième réédition de L’Innovateur fut réalisée pour le séminaire des compagnons boulangers et pâtissiers du Devoir qui se déroula à La Rochelle les 11 et 12 avril 1999.)

Ce compagnon, dit Rochelais l’Enfant Chéri (1814-1882), appelait ses Pays et Coteries à se réconcilier en faveur d’un Compagnonnage unifié, sinon unique.

Il est l’auteur d’une chanson intitulée « Plus de bâton de longueur », où il exhorte ses frères à abandonner ces « triques gigantesques ». Comme il l’écrit lui-même dans le premier couplet, cette chanson ne figurait pas dans la première édition de ses œuvres. Elle a donc été écrite après 1859 et publiée en 1870. La voici, telle qu’elle figure dans l’édition de 1907, p. 53-54 :

Plus de bâton de longueur (Air : Le Forçat libéré)

Puisque la paix, frères du Tour de France,
Vient d’établir son domaine chez nous,
Des corps d’état célébrons l’alliance,
Soyons heureux d’un bonheur aussi doux.
D’un sujet neuf, Compagnons que j’honore,
J’augmente, ici, l’illustre « Innovateur »,
Je viens parler du bâton de longueur,
C’est un abus qu’il faut détruire encore.
De l’amitié savourons les douceurs,
Laissons en paix nos bâtons de longueur. (bis)
De ces bâtons que j’abhorre et déteste,
Que l’amitié doit bannir à jamais,
Joyeux enfants, je le dis sans conteste,
C’est un fléau peu digne du progrès ;
Réformons-le d’un accord indicible,
Ne craignons plus d’ennemis sur le Tour,
Puisque nos cœurs sont liés par l’amour,
Suivez les vœux d’un compagnon paisible.
De l’amitié savourons les douceurs,
Laissons en paix nos bâtons de longueur. (bis)
Je me souviens de ces luttes sanglantes,
Car jeune alors je parcourais les champs,
Je me souviens de ces lames tranchantes,
De ces propos mauvais et discordants ;
De l’oppresseur pardonnant l’ignorance,
De l’opprimé j’étais le défenseur ;
Du beau Devoir, chaleureux sectateur,
Je prêche encore la paix du Tour de France.
De l’amitié savourons les douceurs,
Laissons en paix nos bâtons de longueur. (bis)
Ne portez plus ces triques gigantesques,
Triste décor, le progrès n’en veut plus ;
Ne chantez plus de ces couplets grotesques.
L’homme sensé repousse ces abus.
Si vous suivez mes conseils, je l’espère,
Présage heureux d’un délirant bonheur,
L’Enfant Chéri vient en réformateur
Vous assurer d’un avenir prospère.
De l’amitié savourons les douceurs,
Laissons en paix nos bâtons de longueur. (bis)

Dans les années 1870-1890, au sein des compagnons de la Fédération Compagnonnique de tous les Devoirs réunis, de l’Union Compagnonnique des Devoirs Unis et du Ralliement des compagnons du Devoir, apparaissent deux courants :

— L’un, que l’on pourrait qualifier de progressiste, estime que la canne doit être courte, simple, ou même être abolie, puisqu’elle est associée aux rixes d’antan, à des légendes et à un folklore inadapté à l’esprit du siècle, une prolongation des pensées et écrits de Libourne le Décidé qui dénonce « la canne et les rubans dont les ouvriers sont entichés, comme si tous les insignes emblématiques du fanatisme qui les ont toujours égarés n’étaient pas une insulte faite au progrès de la civilisation »

— Tandis qu’un autre courant conservateur, s’attache lui, à maintenir la canne comme témoignage du glorieux compagnonnage de jadis, associé à la mémoire des anciens, à leur Tour de France, et à une riche symbolique.

C’est ce second courant qui sera victorieux. Aujourd’hui, l’ensemble des compagnons de tous rites porte une canne. La hauteur de la canne chez les compagnons boulangers du Devoir et restés fidèles au Devoir est définie par la pomme qui doit en principe arriver à la hauteur du cœur de son propriétaire.

 

Extrait du livre « Le pain des Compagnons » L’histoires des compagnons boulangers et pâtissiers

Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D.

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