La pâte feuilletée
La naissance de la pâte feuilletée a donné lieu à bien des légendes, on a écrit qu’elle avait été inventée par Claude Gelée dit Le Lorrain, le célèbre peintre du XVIIe siècle qui avait été pâtissier dans sa jeunesse. Certains croient qu’un certain Feuillet qui vivait à la même époque l’aurait créé. D’autres enfin l’attribuent à l’entourage italien de Catherine de Médicis.
En réalité, on peut tracer l’origine de la pâte feuilletée jusqu’à l’Antiquité. Les Grecs qui, aujourd’hui encore, en font une grande utilisation, en sont les inventeurs.
Cette façon de préparer la pâte en la travaillant intercalée avec des mottes de beurre qui, emprisonnées, la feront gonfler de manière étonnante à la cuisson, est ensuite passée à Rome puis revenue à Byzance, capitale de l’empire romain d’Orient à la fin de l’Antiquité où un gâteau à base de pâte feuilletée et de crème au miel et aunard (valériane) préfigure déjà notre millefeuille.
Les invasions arabes au cours du haut Moyen Âge ont permis de répandre la recette de cette pâte autour du bassin méditerranéen (pastilla marocaine, pâte à brik tunisienne) et en Europe : pastis gascon et feuilleté catalan. D’ailleurs, la première recette publiée de pâte feuilletée s’intitulait en effet Pastéz d’Espaigne Fueiltéz (in Ouverture de cuisine par Maître Lancelot de Casteau, publié en 1603). En Europe centrale occupée par les Arabes, elle a donné naissance au strudel.
C’est à la Renaissance que les pâtissiers italiens de Catherine de Médicis la remettent à la mode, la légende n’est donc pas complètement fausse et qu’elle a été amplement utilisée depuis, sans plus jamais connaître de recul.
La pâte feuilletée est à la base de la plupart des viennoiseries, du mille-feuille, du puits d’amour, du pithiviers et de la galette des rois ainsi que du vol-au-vent ou bouchée à la reine de Carême.
Le cuisinier français François Pierre de La Varenne publie en 1651 son livre intitulé «Le Cuisinier François» et il est considéré comme le premier livre culinaire après la révolution. Il est l’homme qui aurait créé le millefeuille, il aurait ensuite été perfectionné par Marie-Antoine Carême, cuisinier de Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord. Mme Maguelonne Toussaint-Salmat, l’auteur de «La très belle et très exquise histoire des gâteaux» mentionne néanmoins une recette publiée dès 1806 et signée d’un certain Rouget.
Mais c’est en fait la pâtisserie Seugnot, 28 rue du bac à Paris, qui proposa les premiers millefeuilles en 1867 par Mr De Dubose, le chef pâtissier d’Adolphe Seugnot.
Notons une fausse légende venue de la perfide Albion, le Millefeuille n’était pas le gâteau préféré de Napoléon Bonaparte (Napoléon étant par ailleurs le nom de cette pâtisserie en anglais) qui en aurait attrapé une indigestion à la veille de Waterloo.
Traditionnellement, le millefeuille est fourré d’une crème pâtissière à la vanille et aromatisée au rhum, aujourd’hui remplacée par une crème à mille-feuille, une crème pâtissière rendue plus aérienne par l’adjonction d’un tiers de son poids en crème fouettée, dont les côtés sont décorés d’amandes effilées ou de brisures de crêpes dentelle, et dont le dessus est soit glacée au fondant soit recouvert de sucre glace.
Au même titre que la crème brûlée ou l’éclair, la mille-feuille symbolise le génie de la pâtisserie française dans le monde entier. Depuis quelques années, le millefeuille traditionnel recule au profit d’interprétations plus originales et contemporaines.
Compte tenu de la méthode traditionnelle de préparation de la pâte feuilletée, en six étapes de pliages en trois, le mille-feuille comporte en réalité 729 paires de feuillets.
Millefeuille sans trait d’union, pour l’académie française et les dictionnaires, Larousse, Robert, Hachette…, l’orthographie est sans trait d’union. Cela vient du latin millefolium ou du vieux français milfoil en un seul mot. La forme à trait d’union ne serait pas considéré comme une faute cependant.
Laurent Bonneau Normand la Fidélité CBRFAD.