Anne-Marie LAMOTTE est née le 22 septembre 1814 à Beugnon, petit hameau du Morbihan, fille de François LAMOTTE, tailleur et de Marie MORIN, demeurants au village de Tristan.
Anne-Marie arrive à Nantes à l’âge de 17 ans, elle a des dispositions à suivre des cours de médecines, et se dirige pour cela vers la capitale, où pendant deux ans elle suit des cours d’herboriste à l’Académie royale de médecine, et reçoit son diplôme national d’herboriste de première classe, ce qui lui donne le droit d’exercer dans l’ensemble du territoire français, contrairement aux herboristes de 2e classe qui peuvent eux exercer uniquement dans leur département…
Louis Marie ORIO est né à Malestroit (56) le 23 mars 1819 (fils de Mathurin ORIO chapelier/ épicier -ne le 20 janvier 1793 à Malestroit, + 5 mars 1833- et de Marie Anne ROBERT, mariés le 11 novembre 1814 à Malestroit, + 5 avril 1867)
Louis Marie ORIO est reçu Compagnon boulanger du Devoir à l’âge de 18 ans à Angers lors de l’Assomption 1837 sous le noble nom de Vannois le Décidé.
Sont reçus au côté de Vannois le Décidé, Rennois la Victoire, Manceau la Bonne Volonté et Bourguignon le Courageux (Registre de réception du Cayenne de Saumur).
Anne-Marie LAMOTTE revient a Nantes ou elle epouse le 23 septembre 1846 le compagnon boulanger Louis Marie ORIO Vannois le Décidé.
Dans son acte de mariage Louis Marie ORIO, Vannois le Décidé est declaré « épicier » ; il est « autorisé à contracter mariage suivant permission de Monsieur le général commandant le département de la Loire-inférieure en date du 12 juillet mil huit cent quarante six » ; il est « domicilié de fait à Nantes, haute grand’rue, 2e canton, et de droit à Metz (Moselle) » :
Ces quelques lignes nous instruise sur le fait qu’à cette période Vannois le Décidé, qui a vingt sept ans, cinq ans plus jeune que son épouse, devait être encore sous les drapeaux, mais pas obligé de rester en garnison à Metz, revenu à Nantes pour son mariage, mais restant malgre tout sous l’autorité de l’armée jusqu’à sa libération, à la fin de son service .
Les temoins sont :
– Charles FRANCOIS, ancien officier supérieur, officier de la Légion d’Honneur et chevalier de Saint-Louis, 68 ans, demeurant quai de la Fosse ;
– Joseph Edouard Henri MARION, capitaine d’artillerie, chevalier de la Légion d’Honneur, 54 ans, demeurant au château ;
– Fortuné COELINA, docteur en droit, avocat à la cour royale de Paris, 45 ans, demeurant haute grande rue ;
– Louis LEDIREUX, propriétaire, 52 ans, demeurant place du Port.
Nous remarquons un fait particulier, les témoins du mariage ne sont pas des Compagnons boulangers ou homme du peuple comme cela l’est dans 98 % des cas lors de mariages de boulangers, ce sont cette fois-ci étrangement des notables de la ville.
Pour se remettre dans le contexte, n’oublions pas Vannois le Décidé à 27 ans et n’est « que » boulanger… Nous savons qu’il est membre d’une loge maçonnique, il y a de fortes probabilités que ces quatre témoins de « haute volée » soient des frères maçons d’une loge nantaise à laquelle il appartiendrait.
À Nantes en 1847, Anne-Marie ORIO donne naissance à une fille, (nous ignorons ce jour son nom) et en 1851 à un fils nomme Louis qui épousa la profession de boulanger comme son père (nous ne connaissons pas le nombre total d’enfants).
Cette même année 1851, Anne-Marie ORIO est reconnue mere des Compagnons boulangers du Devoir de Nantes, 14e Cayenne du tour de France. Le siège de cette société se situe donc à partir de cette date au domicile de Vannois le Décidé. et son épouse Anne Marie, 26 rue du Marchix, rue faisant partie à la fin du 19e des hauts lieux de la criminalité Nantaise et considère comme quartier insalubre avec un taux de décès des plus élèves sur l’ensemble des quartiers de la ville.
D’ailleurs, en 1854, le malheur vient frapper la famille ORIO, leur fille âgée de 7 ans décède de courte maladie.
Vannois le Décidé recoit/achète une lithographie delivrée par COULON, Champagne l’Ami de l’Honneur. (vendu à Drouot en 2005)
Pour la fête de la Saint-Honoré 1869, Louis, fils de la Mère ORIO et de son époux Vannois le Décidé, parti sur le tour de France est reçu Compagnon boulanger du Devoir sous le noble nom de Nantais la Chaine d’Alliance à l’age de 18 ans, il n’a pas de frère de réception. L’année suivante, celui-ci rentre au pays et adhère le 9 janvier 1870 à la société des Anciens Compagnons Réunis de Nantes.
En 1890, nous le savons membre d’une loge maçonnique parisienne « Droit et Justice ».
Registre de réception de la cayenne de Saumur.
Vannois le Décidé est site dans une chanson de Pierre Marie VINCENT, Nantais la Pensée ayant pour titre « Aux Compagnons boulangers de la 14 eme cayenne du tour de France » publiée dans le chansonnier « Chansons inédites par PM Vincent dit Nantais la pensée, Compagnon boulanger du Devoir » 1868. (le seul exemplaire connu à ce jour est archivé à la BNF ).
Voici l’extrait : « …et du Vannois que décidé l’on nomme, chantons amis les sublimes lecons , des compagnons il est sage Prud’homme, chantons amis, chantons ce compagnon.. »
À une date inconnue à ce jour, mais antérieur à 1879, Louis Marie ORIO, Vannois le Décidé quitte Nantes pour rejoindre la ville du Mans. Son épouse (ou ex-épouse) reste à Nantes, assumant seule sa position de Mère des Compagnons boulangers du Devoir et cela jusqu’au 13 décembre 1883.
Un an plus tard, le 19 novembre 1884, la Mère ORIO décède à son domicile au 26 rue du Marchix. Ses obsèques on lieu le 21 novembre à Nantes et les Honneurs compagnonniques lui sont rendues dont une chaine d’alliance en présence de son fils Louis, Nantais la Chaine d’Alliance, mais en l’absence de son époux, Vannois le Décidé. Elle aura exerce sa fonction de mere pendant 33 ans, ce qui fait d’elle a ce jour l’une des quatre meres de tenants les records de longévité dans la fonction (Mère LANNES d’Agen 47 ans ; Mère JACOB de Tours 43 ans ; Mère ORIO de Nantes 33 ans Mère MERAND de La Rochelle 30 ans)
Voici un extrait du déroulement de la cérémonie vue par le compagnon boulanger OLIVIER, Nantais le Génie du Devoir, publie dans le numéro 87 du journal « La Fédération Compagnonnique » du 21 décembre 1884 :
«… Vendredi 21 mai courant, les CC. : boulanger de la ville cay. : de Nantes conduisaient au champ du repos cette femme dévouée qui était leur mère depuis 1851. Un appel avait ete fait à toutes les corporations, afin qu’elles veuillent bien honorer de leur présence cette funèbre cérémonie.
Plusieurs corporations ont tenu à s’y faire représenter, ce sont : les CC. : P. : couvreurs, les CC. : serruriers D. : D. : ; les CC. : cloutiers, les CC. : tanneurs, les CC. : cordiers, les CC. : bourreliers, les CC. : teinturiers, les CC . : cordonniers D. : D. : et les CC. : sabotiers. Qu’ils reçoivent ici tous nos remerciements et d’amitié fraternelle. Nous devons aussi adresser l’expression de nos sentiments les plus affectueux à la loge Droit et Justice de Paris, qui a bien voulu envoyer une superbe couronne à notre mere Orio, en témoignage d’amitié fraternelle à son fils, membre actif de cette loge.
À deux heures, tous les CC. : munis de leurs insignes se formaient en cortège devant la demeure mortuaire. Trois rouleurs, cannes garnies ouvraient la marche : le rouleur des boulangers assisté du rouleur des tanneurs et du rouleur des cordonniers D. : D. : . Les cordons du poêle étaient tenus par les quatre plus anciens compagnons boulangers. Le deuil était forme par le fils de la mère, qui est C. : boulanger et off. : de la loge Droit et Justice, assisté des délégués de la cay. : de Saumur. Ensuite sur deux longues files plus de 150 compagnons formaient la haie, traversant une partie de la ville, pour se rendre au cimetière de la Bouteillerie, édifiant tous ceux qui se trouvaient sur ce long parcours, par leur maintien et l’ordre parfait qui regnait dans les rangs.
Arrivé au champ du repos, la fosse béante, prête à recevoir la dépouille mortelle de celle qui fut, pendant 33 ans, la mère des CC. : boulangers. Les compagnons formant la chaine d’alliance autour de la tombe, ont rendu les honneurs compagnonniques à cette excellente mère. Puis les discours du F. : Legrand, Nantais la tranquillité, C. : boulanger ; Olivier, Nantais le génie du devoir, C. : boulanger, Violleau, Saintonge la bonne conduite, C. : boulanger et délégué de la cay. : de Saumur.
Cette funèbre cérémonie terminée, les CC. : et les nombreux assistants se retiraient péniblement impressionnés par cette touchante cérémonie. Quelques instants apres les CC. : de tous les corps présents se réunissait pour porter un toast à l’union de tous les corps compagnonniques…
Le 4 mai 1888 au Mans, Vannois le Décidé, épouse Victorine NICOLE (née le 18 décembre 1834 à Nantes, fille de père et mere inconnus) veuve du boulanger Étienne DIXNEUF décède à Nantes le 16 novembre 1885 à son domicile 6 impasse Gaudin. Ce dernier est fils d’Étienne DIXNEUF et Jeanne FRANCHETEAU, boulanger également.
En 1890, il adhere à l’Union compagnonnique dont il est l’un des fondateurs de la section du Mans, c’est d’ailleurs de sa main qu’une lettre est écrite au préfet de la Sarthe pour l’informer du souhait des Compagnons des Devoirs Unis de fonder une section dans cette ville. Il devient trésorier de cette nouvelle société qui vient succéder à la Fédération Compagnonnique des Devoirs Réunis du Mans dont Vannois le Décidé est membre depuis 1879
Le 6 juillet 1890, Vannois le Décidé décède a son domicile 3 rue d’Alger. Il est inhumé le 8 juillet, en l’absence complète de membre de sa famille et reçoit les Honneurs compagnonniques par les Compagnons Réunis du Mans.
À ce jour nous ne possédons aucun element pouvant nous instruire sur la vie de son fils Louis, Nantais la Chaine d’Alliance.
L’Union Compagnonnique, numéro 22 du 3 aout 1890.
Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D.
Mon Cher Picard la Fidélité,
Une fois de plus, je suis étonné et émerveillé par ce chapitre tellement riche en détails! Il est comme beaucoup d’autres, très bien documenté avec des faits précis et incontestables, et d’autre part, parfaitement bien illustré! Merci Picard la Fidélité, de nous faire partager ta passion de cherchant sur la grande famille des Compagnons Boulangers!
Ce qui me désole le plus, et c’est une constatation maintes fois exprimée que je réitère une fois de plus : l’indifférence des Compagnons Boulangers-Pâtissiers contemporains devant ton travail monumental! Car, à ne pas en douter, un tel article suscite beaucoup de temps, de travail, et de patience! Et tout çà, pour même pas un mot d’encouragement ni de gentillesse à ton égard! Que c’est triste de vivre dans un monde de sauvage et sans gratitude!
Agenais la Tolérance
CB