L’union compagnonnique 2/2

Le 18 août 1895, la cayenne de Marseille adhéra à l’Union Compagnonnique et le 16 septembre 1895 Lucien Blanc écrivit à chaque cayenne de compagnons boulangers du Devoir ce qui suit :

< Couleur rouge de l’Union Compagnonnique des Devoirs Unis de 1889 à nos jours. Dessin d’Alphonse Fardin, Normand le Bien Aimé du Tour de France, compagnon cordonnier de l’Ère Nouvelle du Devoir.

Couleur de Mère de l’Union Compagnonnique des Devoirs Unis ou d’Honneur de compagnon des Devoirs Unis.

Nous venons d’apprendre que votre corporation avait décidé de nommer deux délégués de chacune de vos cayennes pour tenir un congrès. Comme beaucoup de vos cayennes ne pourront peut-être pas envoyer de délégués et par ce fait prendre part aux discussions soumises à cette assemblée, il serait bon qu’elles résument, selon les vœux de la majorité de leurs membres, leurs points de vue sur l’adhésion ou non de votre corporation à l’U.C. et qu’elles les envoient au congrès qui doit s’ouvrir à Blois le 26 courant. Vous connaissez tous les avantages de l’U.C. qui, tout en laissant à l’activité son entière liberté de se régir et d’instruire ses nouveaux reçus, accorde à ses membres partout où ils se trouvent une indemnité en cas de maladie, des secours de route et leur fait un enterrement entièrement convenable en cas de décès… Mais il y a encore quelque chose de plus sublime à l’U.C., c’est l’accord de paix qui existe entre toutes les corporations adhérentes de faire de nombreuses recrues sur le Tour de France.
Lucien Blanc, Provençal le Résolu C.B.H.D.D.

< Couleur de Mère de l’Union Compagnonnique des Devoirs Unis ou d’Honneur de compagnon des Devoirs Unis.

Le congrès des compagnons boulangers du Devoir, qui se tint à Blois du 26 au 29 septembre 1895, vota la non-adhésion à l’U.C. Cette décision entraîna la naissance des Compagnons Boulangers du Devoir adhérant à l’U.C., qui se séparèrent du Tour de France.

Ce congrès imposa également à ses corporants de quitter l’U.C. sous peine d’être déclarés renégats ; les cayennes, qui ne seraient pas en règle avec la chambre administrative, seraient rayées du Tour de France. Difficile dilemme pour ces compagnons boulangers qui, depuis

1874, étaient bien souvent participants à la F.C.D.T.L.D.R. puis à l’U.C. Certains, par discipline corporative, démissionnèrent de l’U.C., d’autres reçurent les premiers compagnons boulangers du Devoir de l’U.C., pères des compagnons boulangers de l’U.C.

À Nantes, la séparation des deux fractions de boulangers pro et anti U.C. fut entérinée. Les pro-U.C. présentèrent à l’U.C. le 26 octobre 1895 leur premier aspirant boulanger à la réception, Joseph Lecoq, Vendéen le Fier Décidé. Cette scission entraîna une avalanche d’articles agressifs dans la presse compagnonnique et en particulier dans les pages du Ralliement des Compagnons du Devoir, organe des compagnons restés fidèles au Devoir.

Voici, par exemple, l’extrait d’un article écrit le 20 janvier 1896 par Victor Soton, Tourangeau la Fierté du Devoir, et publié dans le Ralliement, au sujet du départ des compagnons boulangers restés fidèles au Devoir de chez leur Mère de Nantes :

La présente et toute fraternelle et par là même vous prie de faire connaître au Tour de France notre changement de Mère. Nous ne sommes plus rue de la Juiverie, nous avons quitté cette maison, car la belle société anti-unioniste ne veut plus coudoyer ceux qui ont pour tâche l’anéantissement des vrais compagnons du Devoir. Qu’ils y prennent leurs aises dans cette maison, nous n’aurons plus devant nos yeux ces trop fameux hommes de progrès qui, par leurs actes, nous font voir que leur progrès est avant tout la destruction de notre ordre compagnonnique.

Ils cherchent par tous les moyens, ces fanfarons de la discorde, à faire tomber notre respectable société. Les lois saintes que nous ont léguées nos ancêtres sont selon eux trop demandées. Voilà la belle situation que nous font à Nantes les hommes voués à la doctrine du sieur Blanc, le chevalier de la discorde compagnonnique. Lorsque celui-ci aura passé la barque à Caron, la gente de l’Union lui élèvera une statue où ils feront inscrire sur un marbre blanc : «À la mémoire du régénérateur du compagnonnage». Ce qui veut dire en bon français à l’auteur de nos discordes compagnonniques, les hommes qui sont tombés dans son panneau lui ont élevé une statue pour perpétuer son souvenir et nous, compagnons du Devoir, nous ferons des vœux pour qu’avec lui disparaissent les principes qu’ils préconisent depuis si longtemps et qui sont un obstacle pour la bonne harmonie qui doit régner dans le compagnonnage.

Jean André Camille Richoux, Nantais la Tranquillité, compagnon boulanger du Devoir adhérent de l’Union Compagnonnique, époux de la Mère de l’Union Compagnonnique de Nantes, 11, rue de la Juiverie.

Du jour où nous avons donné nos trois mois à l’ancienne Mère, les re- jetons de la triste Union achètent les hommes pour en faire selon leur dire des compagnons. Fi donc ! Des compagnons ne peuvent sortir de la taverne unioniste. Tous les moyens sont bons à cette horde de parjures pour jeter le trouble dans nos rangs, ils n’attendent pas même que ceux qu’ils attrapent aient passé par un noviciat quelconque. Sitôt racolé, il est passé dans la réception commune et on le gratifie d’un nom, par exemple comme ceux-ci : Nantais l’Ami du Siècle ou Manceau l’Ami de l’Union, etc., etc. aussi clouons-nous au pilori les ex-compagnons boulangers qui autrefois reçurent ces noms : Richoux, Nantais la Tranquillité, Olivier, Nantais le Génie du Devoir, Vincent, Nantais la Pensée, Merlet, Nantais l’Appui du Devoir et Brochard, Vendéen la Gaité.

Ces cinq messieurs sont des rebelles de notre belle société, qui ont fait tout leur possible pour manger la caisse ; les uns la défoncent, les autres s’emparent de ce qu’il y a dedans, cela fait voir que ces messieurs sont partout les mêmes. Lorsqu’il s’agit d’une mau- vaise action on peut compter sur le concours de la gente blanquiste…

L’une des publications les plus originales attaquant l’Union Compagnonnique, est celle de François Magnan (signée Théophile), Angoumois l’Exemple de la Justice. C’est une histoire en plusieurs épisodes intitulée «Trois chiens blancs» (publiée entre mars et juillet 1897), Magnan se mettant lui-même en scène sous le pseudonyme de Fox.

En voici quelques extraits :
[…] dans une vieille et sombre ruelle de Nantes, siège à cette heure une société que l’on ne peut qualifier d’aucun titre vu son caractère et son organisation ; l’aspect du local en est sévère. Dans les couloirs humides et noirs résonnent des pas de bêtes, et dans la salle obscurcie par la fumée ce n’est généralement que cris, disputes, blessures, carreaux cassés, alcools et boissons qui coulent sur les tables et sur le sol. Le chien qui arrive dans un tel logis se demande à lui-même s’il est vraiment chez une Mère ou plutôt dans un lieu d’orgies mêlé à toutes espèces d’êtres immondes. Un soir d’hiver, c’était le 2 février 1894, le ciel était d’un gris sale. Fox, chien dogue de la race blanche, arrive dans la vielle niche vers quatre heures du soir.

Il croyait, étant sur le seuil, voir un immense fantôme en un immense linceul ; les étroites fenêtres ogivales semblaient des trous noirs ; seule l’entrée se piquait d’un léger point jaunâtre, une toute petite lueur qui tremblotait. En entrant, il remarqua une petite cheminée de pierre. C’était là que les trois mauvais fils du Devoir tenaient après dîner leur petit comité. Au-dehors, la bise soufflait, fouettant la neige, hurlant dans la rue. Au-dedans, je l’ai déjà dit, c’était mille voix confuses, les uns prêts à aboyer, d’autres à mordre, montrant leurs longues dents prêtes à déchirer la chair de l’arrivant. Par intervalle, les voix parlaient plus bas et étaient plus désespérées. Combien le soir y en avait-il qui allaient à la niche avec des balafres ou un membre éclopé… ?

Madame Richou, Mère des compagnons boulangers de l’Union Compagnonnique des Devoirs Unis, Nantes, novembre 1901; Arch. U.C. de Nantes.

La suite de ce feuilleton est composée d’attaques envers l’Union Compagnonnique préparant son congrès de Nantes et les décisions prises au sujet de l’adhésion du Devoir de Liberté à l’Union Compagnonnique.

Le journal l’Union Compagnonnique publia des articles de compagnons boulangers qui encourageaient les hésitants à rejoindre leurs rangs. Ces écrits prônaient tous la fraternité et le progrès. L’agressivité n’y était pas la même que chez les compagnons restés fidèles au Devoir.

L’un des articles les plus particuliers à ce sujet est celui du compagnon boulanger du Devoir de la cayenne de Nantes, Isidore Olivier, Nantais le Génie du Devoir, publié le 1er mars 1896 dans l’Union Compagnonnique, n° 157. Cet article met en cause le comportement de la jeunesse boulangère du Devoir de la cayenne de Nantes
« Aux compagnons boulangers du Tour de France.
Cayenne de Nantes
Les CC∴boulangers du Devoir de la ville de Nantes, au nombre de dix-neuf, étaient réunis le 20 octobre 1895 en assemblée générale, chez leur Mère, rue de la Juiverie 11. Plusieurs compagnons, empêchés par leur travail, ou autres causes, de prendre part à cette réunion, s’étaient fait excuser tout en donnant par écrit leur adhésion aux décisions qui seraient prises.
Le C∴Vincent, Nantais la Pensée, a exposé le but de la réunion en faisant ressortir que depuis plus d’un an les jeunes CC∴ violaient le règlement en tenant les anciens à l’écart sous prétexte qu’ils font partie de l’Union Compagnonnique, tranchant ainsi des questions du plus haut intérêt de la corporation, notamment l’adhésion au congrès de Blois dont ils ne leur ont jamais parlé, pas plus que d’y envoyer un délégué qu’ils ont nommé sans les consulter, ce qui était cependant de leur devoir de faire. Plusieurs CC∴ prennent tour à tour la parole disant que plus de cent CC∴ boulangers font signer une demande pour que la corporation adhère à l’Union Compagnonnique vu que cette adhésion lui permettra de faire de nombreuses recrues sur tout le Tour de France et de rétablir son activité dans ses nombreuses cayennes. »

Après ces explications, l’Assemblée déclara que les jeunes com- pagnons avaient méconnu les droits des anciens et outrepassé les pouvoirs que leur conférait le règlement :

  1. – En ne convoquant pas les anciens aux assemblées générales intéressant la corporation tout entière.
  2. – En ne les prévenant pas qu’un congrès de la corporation devait se tenir à Blois.
  3. – En nommant un délégué pour ledit congrès sans les inviter régulièrement à prendre part à cette élection.

Vu l’irrégularité de la nomination des délégués et la tenue du congrès de Blois, les CC∴ présents considèrent que les décisions qui y ont été prises, faisant renégats tous les CC∴boulangers inscrits à l’Union Compagnonnique, sont nulles et non avenues, attendu que tous les CC∴ en règle ont le droit incontestable de faire partie de cette institution. En conséquence, vu les faits autoritaires de la part d’une infime minorité de notre corporation réfractaire à tout progrès, malgré nos appels réitérés à la conciliation, il est décidé qu’à l’avenir nous présenterons des aspirants aux réceptions de l’Union Compagnonnique en vertu des décisions prises par le congrès de Nantes, sur la base de nos principes corporatifs.
Avec l’assentiment unanime des CC∴ présents à l’Assemblée du 26 octobre 1895 et après avoir rempli toutes les formalités prescrites, nous avons présenté à cette date un aspirant à la réception de l’Union Compagnonnique. À Noël, deux autres aspirants, et onze le 26 janvier. C’est donc quatorze aspirants que nous avons fait recevoir à
Nantes, et avec les cinq qui ont été reçus dans les diverses autres villes, cela porte le nombre à dix-neuf. Pour Pâques nous pensons présenter de nouveaux aspirants, et nous espérons que notre exemple sera suivi dans toutes les sociétés de l’Union Compagnonnique. C’est la meilleure réponse à faire aux attaques dont font l’objet les CC∴ boulangers faisant partie de cette institution. C’est aussi le meilleur moyen de relever notre corporation en ayant soin d’enseigner aux jeunes gens l’amour du travail et les sentiments de fraternité envers leurs FF∴, ce qui vaut mieux que de prêcher la haine entre des hommes qui devraient être unis par le Devoir.
Nous prions les jeunes compagnons boulangers de l’Union Compagnonnique de ne pas craindre de se mettre en route pour Nantes. Ils trouveront chez notre Mère, Madame Richoux, 11 rue de la Juiverie, bon gîte et travail, et chez les anciens, aide et protection. Nous les invitons également à bien vouloir se mettre en rapport avec nous en adressant leurs lettres au C∴Olivier, 69 rue de Rennes, ou au C∴Vincent, rue Saint- Clément, 16.
Nantes le 22 février 1896.
Pour la Société et par son ordre.

    1. Olivier, Nantais le Génie D∴D∴ C∴B∴D∴D∴

Voici un autre article, en réponse aux attaques des Restés Fidèles au Devoir, publié par le journal L’Union Compagnonnique, n° 187, 6 juin 1897 :

Aux compagnons boulangers du Tour de France et à ceux de tous les corps d’état.
Chers CC∴ et F∴
C’est avec la plus grande satisfaction que nous voyons, dans beau- coup de villes, des CC∴ boulangers et d’autres corporations non adhérentes, imbus de nobles sentiments de fraternité, qui ont suivi le mouvement que nous avons donné à notre cayenne de Nantes, en présentant et en faisant recevoir à l’Union Compagnonnique, des asp∴ boulangers, laissant de ce fait ceux de nos FF∴ qui, par leurs idées surannées ou par égoïsme, préféreraient laisser disparaître notre corporation plutôt que de s’associer au progrès adopté par la plupart des corps d’état qui ont plus qu’eux l’amour du Compagnonnage et le souci de son avenir.
Les réfractaires aux principes d’humanité solidaire proclamée par le congrès de Nantes et enseignée dans l’Union Compagnonnique, nous traitent de renégats, nous qui suivons les doctrines de nos fondateurs et celles de tous les compagnons humanitaires qui ont prêché et ne cessent de prêcher la paix et la concorde parmi les artisans de tous les corps et de tous les rites, unis sous l’égide des trois grands maîtres du compagnonnage.

Le 20 juin 1897, les boulangers du Devoir adhérant à l’Union Compagnonnique de Tours, présentèrent leur premier aspirant à la réception, René Badaire, présenté par Louis François Lesourd, Tourangeau la Gloire du Devoir (reçu en 1874), reçu sous le nom de Montauban la Ferme Volonté.

Et ils osent se dire restés fidèles au Devoir, eux qui emploient toutes sortes de moyens pour semer la discorde dans nos rangs, aimant mieux voir périr notre belle et antique institution que d’accepter les moindres réformes ! La postérité jugera lesquels d’eux ou de nous ont raison. Déjà l’opinion publique s’est prononcée en notre faveur ! Mais laissons là cette question et occupons-nous à chercher dans le progrès quelques nouvelles améliorations. Parmi ces améliorations, notre grand désir serait de voir mettre en pratique les vœux exprimés par de nombreux CC∴ de tous les corps de métier, c’est-à-dire trouver le moyen de faciliter les jeunes CC∴ à faire comme autrefois leur Tour de France, ce qui leur permettrait de connaître la façon dont on travaille dans les diverses villes de France. Ce serait pour eux une mission instructive autant qu’agréable : ils n’auraient plus, comme jadis, à craindre les discussions et les batailles que se livraient les CC∴ entre eux, car aujourd’hui, par l’Union Compagnonnique établie dans plus de quarante villes, les voyageurs trouveraient non seulement secours et assistance, mais ils rencontreraient encore des amis dévoués qui se mettraient à leur disposition pour leur faciliter à trouver du travail et pour les mettre en relation avec leurs frères de tous les corps d’état.

Pomme de canne de René Badaire, Montauban la Ferme Volonté, C∴ B∴ D∴ D∴ D∴ L∴ U∴ C∴ pour Compagnon Boulanger Du Devoir De l’Union Compagnonnique ; seule canne connue à ce jour portant cet intitulé.

Par ce moyen on rétablirait le Tour de France, et on pourrait voir, comme autrefois, une phalange de jeunes gens parcourir la France. Que la jeunesse, partisane de l’Union Compagnonnique, ne craigne pas de se mettre en route afin d’augmenter les bagages de ses capacités professionnelles, d’acquérir des connaissances et des vertus que seul le voyage peut donner.
Nous engageons donc tous les CC∴ à étudier le moyen de faciliter la réorganisation du Tour de France, et à inviter les jeunes gens de leur corporation à voyager.
Pour la Société :
Giraudet, Vendéen Sans Gêne P∴E∴V∴ Algand, Nantais l’Égalité, S∴E∴V∴ Hervoche, Nantais le vainqueur, R∴

Le 4 octobre 1896, la cayenne de Toulouse ayant adhéré à l’Union Compagnonnique, présenta son premier aspirant à la réception, Sosthène Castex, reçu sous le nom de Toulousain la Fidélité du Devoir et le 26 octobre suivant, la cayenne de Toulon adhéra elle aussi à l’Union Compagnonnique.

Le 20 juin 1897, les boulangers du Devoir adhérant à l’Union Compagnonnique de Tours, présentèrent leur premier aspirant à la réception, René Badaire, présenté par Louis François Lesourd, Tourangeau la Gloire du Devoir (reçu en 1874), reçu sous le nom de Montauban la Ferme Volonté.

Entre 1895 et 1899 cette première génération de compagnons boulangers du Devoir de l’Union Compagnonnique a vu la réception de quatre-vingt-dix-sept compagnons boulangers du Devoir de l’Union Compagnonnique. Quatre d’entre eux, par leur action, reçurent l’écharpe d’honneur. Ce sont les compagnons :

René Badaire, Montauban la Ferme Volonté, portant à la boutonnière ses couleurs de compagnon boulanger du Devoir et à l’épaule la couleur rouge de l’Union Compagnonnique. Arch. Patrice Martinaud, arrière-petit-fils du compagnon.

Congrès de Toulouse, du 4 au 10 septembre 1899.

Écharpe d’Honneur blanche de
l’Union Compagnonnique remise à Tours
en 1947 à René Badaire, Montauban la Ferme Volonté,
et couleur rouge de l’Union Compagnonnique brodée
aux initiales de Montauban la Ferme Volonté,
Compagnon Boulanger des Devoirs Unis.
Arch. Patrice Martinaud,
arrière-petit-fils du compagnon.

  • Edmond Bagouet, Périgord la Tranquillité.
  • Florentin Giraudet, Vendéen Sans Gêne, qui fut notamment délégué de congrès.
  • Jacques Chrétien, Angevin la Belle Union, président de cayenne.
  • René Badaire, Montauban la Ferme Volonté, président de cayenne. Il recevra également l’écharpe d’honneur des compagnons tisseurs-ferrandiniers du Devoir en 1932.

 

Le congrès de Toulouse, du 4 au 10 septembre 1899

Ce congrès vota l’unification des corps et des rites ainsi que l’appellation «Des Devoirs Unis». Cela signifie qu’à partir de ce congrès les boulangers reçus compagnons à l’Union Compagnonnique ne furent plus reçus sous le nom de Compagnon boulanger du Devoir de l’Union Compagnonnique, mais de Compagnon boulanger des Devoirs Unis.

Les compagnons boulangers du Devoir, Léopold Modeste, Champagne l’Ami des Compagnons, Augustin Girard, Angoumois l’Ami du Progrès et Eugène Régnier, Rochefortin l’Ami des Compagnons furent présents à ce congrès.

Ce congrès donna aux compagnons de Nantes le soin de rédiger la liste des groupes d’activités formant l’Union Compagnonnique, liste établie conformément aux décisions du congrès de Toulouse. Le premier groupe se composait du groupe alimentaire. Aux boulangers furent associés comme partie similaire les pâtissiers fouaciers, cuisiniers.

Cette décision, prise il y a plus d’un siècle, a eu pour l’Union Compagnonnique de grandes répercussions puisque ce sont, à l’heure actuelle, deux métiers en pleine prospérité ayant donné au Compagnonnage des hommes de grande valeur.

Le premier aspirant cuisinier, Augustin Joubert, fut inscrit à la cayenne de Valence en mars 1900 et fut le premier cuisinier reçu de cette cayenne, le 1er décembre, sous le nom de Dauphiné l’Estimable ; six mois après la décision du congrès, ce fut le premier pâtissier. À Agen, l’aspirant Maufreron Pierre, Angoumois, fut inscrit le 9 février 1901, d’autres suivirent.

Le premier compagnon pâtissier fut Gabriel Léon Douzeaud, Périgord le Bien Dévoué, reçu à Périgueux, le 27 mai 1902 (inscrit aspi- rant à Périgueux le 28 mai 1901).

 

L’Union Compagnonnique au XXe siècle

En douze années s’est créé à Paris un groupe de compagnons pâtissiers cuisiniers des Devoirs Unis, suffisamment fort pour se constituer en cayenne active, ayant parmi ses membres des compagnons de grande valeur tel Émile Fétu, Blois Cœur Fidèle, qui participa activement à la rédaction du célèbre guide culinaire au côté d’Auguste Escoffier, et dont le nom figure en dédicace de l’ouvrage dans la préface.

Compagnons boulangers des Devoirs Unis, Blois, 1908.

Après Paris, une cayenne des compagnons cuisiniers pâtissiers des Devoirs Unis naquit à Londres. La guerre de 1914-1918 arrêta cette progression, mais au moins trois réceptions eurent lieu à Londres, dont celles en 1914, de François Maurin, Bourguignon le Cœur sur la Main, et Charles Duthil, Savoyard la Bonne Volonté, tous deux compagnons pâtissiers des Devoirs Unis.

En 1913, un projet de création d’activités des compagnons cuisiniers pâtissiers des Devoirs Unis fut soumis à la direction générale.

En mai 1914, un compagnon pâtissier glacier fut reçu à Paris, François Grevat, Savoyard l’Ami du Bon Travailleur.

Au Havre, en 1921, un projet du groupe corporatif fut proposé, mais il n’aboutit pas. Cette même année, Jean Simion, Toulousain le Laborieux, reçu à l’Union Compagnonnique de Saintes en 1906, participa à la refondation de la cayenne des compagnons boulangers du Devoir de Toulouse.

< Paulin Brain, Vivarais la Belle Prestance, reçu compagnon boulanger du Devoir à Marseille à la Saint-Honoré 1893 ; dernier président de cayenne de l’Union Compagnonnique de Nîmes avant la Première Guerre mondiale.

L’activité des compagnons cuisiniers pâtissiers fut importante. En 1922, leur Mère à Paris était établie 67, rue Meslay.
Après-guerre, les règlements des compagnons cuisiniers pâtissiers, auxquels avaient été adjoints les charcutiers, précisèrent que le 11 novembre serait la fête annuelle en souvenir des compagnons tombés au front.

À Paris, en 1925, l’activité comportait soixante-six membres compagnons avec un cachet et un papier à en-tête.
En 1926 les compagnons cuisiniers pâtissiers des Devoirs Unis demandèrent à titre corporatif leur adhésion à la Fédération Générale du Compagnonnage. Cette demande fut refusée, l’Union Compagnonnique étant déjà membre de ladite société.
Au cours de cette période, alors que la Fédération Générale du Compagnonnage était organisée par Ernest Boyer, Tourangeau le Bien Aimé, compagnon maréchal- ferrant du Devoir – visant à rassembler sous un même toit les compagnonnages du Devoir, du Devoir de Liberté et l’Union Compagnonnique – des épouses de compagnons des Devoirs Unis devinrent Mères des compagnons boulangers du Devoir.

À Paris, ce fut Madame Cornibé, 16, rue Charlot, épouse de Lorrain l’Ami du Progrès, compagnon mécanicien des Devoirs Unis, reçue Mère générale des compagnons boulangers du Devoir à la Saint- Honoré 1930 sous le nom de Parisienne la Bien Aimée.
À Toulouse, de 1921 à 1926, Madame Figarol, 3, rue de la Croix, épouse de Toulousain l’Ami du Travail, compagnon cuisinier des Devoirs Unis.
À Tours, en 1935, Madame Joyeux, 9, rue de la Serpe, épouse de Poitevin la Tranquillité, compagnon cuisinier des Devoirs Unis, devint en 1936, Mère de l’Union Compagnonnique.

À Nice fut créée l’activité des Compagnons Cuisiniers Pâtissiers de Nice et du Littoral.
Puis à Tours, René Millet, Tourangeau la Fraternité, créa un embryon d’activité.
Le 9 octobre 1943, à Lyon, René Badaire, Montauban la Ferme Volonté (✝1954) compagnon boulanger du Devoir de l’U.C., reçu en 1897, participa à la session d’information de l’Association Ouvrière des Compagnons du Devoir.

À Paris, en 1954, fut intronisée la dernière Mère de l’activité des compagnons cuisiniers pâtissiers des Devoirs Unis, la Mère Ouvrard, Berrichonne la Bonté (✝1992).
En 1958, l’Union Compagnonnique eut son premier M.O.F. pâtissier, Maurice Lebudie, Breton l’Ami des Arts ; quinze autres titres suivirent, faisant honneur à l’Union Compagnonnique.
Lors de cette période, les compagnons cuisiniers des Devoirs Unis de la ville de Paris se firent un devoir et le plaisir d’inviter les compagnons boulangers et pâtissiers du Devoir à leur bal annuel.

En 1963, les compagnons boulangers pâtissiers du Devoir de la cayenne de Paris décidèrent officiellement, en assemblée générale, d’inviter à chaque Saint-Honoré une délégation des compagnons cuisiniers des Devoirs Unis, et d’envoyer à leur tour une délégation à chaque invitation de la part des cuisiniers pâtissiers des Devoirs Unis de la ville de Paris.

À Genève, le 28 novembre 1964 fut créée l’activité des compagnons cuisiniers pâtissiers des Devoirs Unis de cette ville. Les compagnons cuisiniers des Devoirs Unis Jean Salgues, Basque le Désir de Bien Faire et Roger Pinet, Berrichon l’Ami des Arts, vinrent de Paris pour cette installation. Mais l’activité s’arrêta en 1973.
À Paris, Joël Robuchon, Poitevin la Fidélité, fut le dernier président de l’activité.
En 1979, à Montauban, Yves Thuriès, Tarnais l’Indulgent reçut les joints10, marque indélébile de son appartenance au Compagnonnage aux yeux de tous, marque de confiance de ses pairs, représentant la connaissance parfaite du métier et des traditions.

Les années 1979-1980 virent se développer les compagnons pâtissiers. En 1972, à la création de la cayenne de Nîmes, Jean Lavillonnière, Berrichon l’Ami du Travail, et son fils Jean-Claude, Quercy l’Exemple de son Père, en furent les membres fondateurs.

Jean Lavillonière, Berrichon l’Ami du Travail (†2016), et son fils Jean-Claude, Quercy l’Exemple de Son Père, compagnons pâtissiers des Devoirs Unis, devant leur magasin aux côtés d’entremets montés réalisés pour les 20e anniversaire de l’émission de télévision Des chiffres et des lettres, Nîmes ; 1985.

La cayenne de Nîmes fut fondée le 17 septembre 1905, boulevard Amiral-Courbet, par neuf compagnons dont quatre compagnons boulangers du Devoir, mais elle s’éteignit après la Première Guerre mondiale. En 1980, toujours à l’initiative de Jean Lavillonnière, la cayenne de Lourmarin (84) vit le jour.

Puis à Lyon, en 1982, Gabriel Paillasson, Forézien l’Intrépide, prêta ses locaux pour établir une cayenne.
En 1986, sous l’impulsion de Jean Lavillonnière, la cayenne de Toulon ouvrit ses portes. Claude Mariotti, Provençal Cœur Sincère, compagnon pâtissier, en fut l’un des fondateurs.
En 1993, Pierre Gauducheau, Vendéen la Ténacité, compagnon boulanger des Devoirs Unis devint président général de l’Union Compagnonnique. Sous son mandat eurent lieu l’ouverture du chantier école de Levroux, l’intronisation de quatre Mères et l’ouverture de la ville étape de Vannes. Il fut décoré de l’Ordre du Mérite Agricole et de la médaille d’or de la boulangerie, de la médaille de l’artisanat, et devint membre de l’Équipe de France de la Boulangerie. Il remit son mandat en 1999 à Marc Foucher, Nantais le Désir de Bien Faire, compagnon cuisinier des Devoirs Unis.

< Pierre Gauducheau, Vendéen la Ténacité, compagnon boulanger des Devoirs Unis, revêtu de sa couleur d’honneur reçue en 1993 (1937-2011).

En 1995, la cayenne d’Aix-en-Provence succéda à celle de Lourmarin. Quatre compagnons pâtissiers en furent membres fondateurs : Nicolas Weibel, Provençal l’Ami du Progrès ; Jean Castagnero, Provençal la Persévérance ; Marinot, Provençal la Volonté de se Parfaire ; Erik Melice, Hainaut la Ténacité.
En septembre 2000, ce fut l’allumage des feux de la cayenne de Bordeaux ; Jean-Marie Gauthier, Berry le Soutien de la Famille, compagnon cuisinier des Devoirs Unis, fit partie des compagnons fondateurs.

De 1900 à 2010, deux cent trente compagnons boulangers des Devoirs Unis ont été reçus. Aujourd’hui, l’Union Compagnonnique se compose d’une dizaine de boulangers, d’une dizaine de charcutiers, d’une centaine de pâtissiers et de plus de deux cent vingt-cinq cuisiniers, tous héritiers des compagnons boulangers du Devoir adhérents à l’U.C., leurs pères.
Ont reçu l’écharpe d’honneur de l’Union Compagnonnique, pour fidélité et loyauté envers la société, les compagnons boulangers :

  • Badaire René, Montauban la Ferme Volonté, compagnon boulanger du Devoir de l’Union Compagnonnique, reçu à Tours en 1897, a reçu l’écharpe d’honneur à une date inconnue.
  • Bagouet Edmond, Périgord la Tranquillité, compagnon boulanger du Devoir de l’Union Compagnonnique, reçu à Cognac en 1895, initié compagnon boulanger du Devoir de Liberté de l’Union Compagnonnique, a reçu l’écharpe d’honneur en 1925.
  • Bredeloup Pierre Marie Jean-Baptiste, Nantais La Fidélité, compagnon boulanger des Devoirs Unis, reçu à Nantes en 1904, a reçu l’écharpe d’honneur en 1946.
  • Bouvet Maurice, Breton le Courageux, compagnon boulanger des Devoirs Unis, reçu à Tours 1962, a reçu l’écharpe d’honneur à une date inconnue.
  • Chrétien Jacques, Angevin la Belle Union, compagnon boulanger du Devoir de l’Union Compagnonnique, reçu à Angers en 1897, a reçu l’écharpe d’honneur en 1908.
  • Duperray Joseph Germain, Saumur la Fierté du Devoir, com- pagnon boulanger du Devoir, adhérent à l’Union Compagnonnique, reçu à Orléans en 1886, a reçu l’écharpe d’honneur en 1897.
  • Gaillac Antoine, Agenais La Plaisance, compagnon boulanger du Devoir, adhérent à l’Union Compagnonnique, reçu à Bordeaux en 1853, a reçu l’écharpe d’honneur en 1904.
  • Gauducheau Pierre, Vendéen la Ténacité, compagnon boulanger des Devoirs Unis, reçu à Nantes en 1983, a reçu l’écharpe d’honneur en 1993.
  • Giraudet Arthur Célestin dit Florentin, Vendéen Sans Gêne, compagnon boulanger du Devoir de l’Union Compagnonnique, reçu à Nantes en 1896, a reçu l’écharpe d’honneur à une date inconnue.
  • Guillaume Raymond, Nantais la Sincérité, compagnon boulanger des Devoirs Unis, reçu à Nantes en 1948, a reçu l’écharpe d’honneur en 1972.
  • Lesourd Louis François, Tourangeau la Gloire du Devoir, com- pagnon boulanger du Devoir, adhérent à l’Union Compagnonnique, reçu à Bordeaux en 1874, a reçu l’écharpe d’honneur en 1890.

Portrait présumé d’Emmanuel Robillard, Saintonge Laurier d’Amour, compagnon boulanger du Devoir, membre de l’Union Compagnonnique revêtu de son écharpe d’honneur.

Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D. Extrait du livre  LE PAIN DES COMPAGNONS

Envoyer un commentaire concernant : "L’union compagnonnique 2/2"