13 – Jean-Claude THIERRY – Collection privée.
19mm. Aluminium, octogonal. Avers : BOULANGERIE / LA / TOURQUENOISE. Revers : 1 KG.
Roland Elie, dans son ouvrage « Monnaies de nécessité » référence ce jeton 15.3, et présente une variante réf 20.1 d’un module de 23mm avec au revers 10 pains.
D’autres variantes ronds et lobés avec au revers : Pain blanc, et contremarque « T » ou « R », voir perforés d’un triangle, tel l’exemplaire ci-dessous.
13 a – Collection privée.
13 b – Collection privée.
La Tourquennoise – Boulangerie est fondée en 1894. Son siège est basé au 147, rue de Menin. En 1930, elle comprend 450 sociétaires, son chiffre d’affaires est alors de 721.891 francs. (Annuaire de la coopération).
13 c – Collection privée. Jeton Inédit. La quantité de 50 Pains ne manque pas de nous surprendre.
BOULANGERIE / LA TOURQUENNOISE / sur trois lignes ; 50 / PAINS / GRUAU.
Centre d’histoire locale de Tourcoing :
« Arracher les ouvriers au prolétariat qui les guette et les pourrit » Abbé Lemire.
Le régime quotidien de l’ouvrier est soumis aux aléas de la hausse des prix et aux périodes difficiles : le chômage, les accidents ou les maladies. Des stratégies collectives se mettent alors en place et proposent une nourriture gratuite ou bon marché.
Distribution gratuite de vivres
La charité, publique ou privée, s’est particulièrement développée aux 19ème et 20ème siècle.
Le bureau de bienfaisance La loi du 28 novembre 1796 crée dans chaque commune un bureau de bienfaisance financé par les dons des particuliers et les subventions publiques. Le pain est une des principales denrées distribuées aux indigents :
« Parmi les formes d’assistance employées pour soulager les misères, qu’il s’agisse de veuves ayant des enfants non encore en état de travailler, ou bien de familles […] empêchées momentanément par la maladie ou le chômage de subvenir à leurs besoins,[…] la plus logique, celle qui est le plus communément usitée et qui offre le rendement le plus sûr est la distribution du pain, base principale de l’alimentation. L’administration du Bureau de bienfaisance y consacre les deux tiers de ses dépenses annuelles. » Gustave Dron, Président de la Commission du Bureau de bienfaisance, 1913.
Contre un jeton, les indigents recensés par la commune reçoivent une quantité de pain déterminée.
Du linge, des vêtements et des combustibles peuvent également être distribués. Le bureau de bienfaisance est un élément de stabilisation et de redistribution des richesses dans une société profondément inégalitaire.
Ainsi, peut-on lire dans l’Indicateur de Tourcoing du 9 mai 1847, la réaction d’un notable suite aux émeutes de la faim qui ont mis à sac une partie de la ville : « Tenez vous donc tranquilles, braves ouvriers, demandez des secours sans insulter personne et faites taire vos femmes quand elles ont la langue trop longue.
Le conseil municipal s’occupe d’apporter quelques soulagements à vos misères ; il vient de voter une augmentation de 5000 francs par mois au crédit du bureau de bienfaisance, ce qui porte ce crédit à 240 000 francs par an, somme énorme pour Tourcoing. Les particuliers aussi feront tout ce que leur position de fortune leur permettra.
Ils ne voudront pas que dans une ville comme Tourcoing, si rémunérée par sa bienfaisance, on puisse dire que des malheureux sont morts de faim.
Ainsi donc, que chacun fasse son devoir. Tranquillité et patience d’un côté, charité et fraternité de l’autre, c’est le seul moyen de sortir de l’abîme où une conduite ne ferait que nous enfoncer davantage. »
Les bureaux de bienfaisance prennent le nom de bureaux d’aide sociale en 1953.
Bureau de bienfaisance de Tourcoing, début 20ème siècle, Carte postale, Coll. C.H.L.
Le Bureau de bienfaisance inauguré en 1892 est chargé de la distribution de secours matériels. Géré par les Hospices, il joue un rôle essentiel dans l’application des lois d’assistance obligatoire aux « vieillards » (personnes âgées de plus de 70 ans), infirmes et familles nombreuses. Les bureaux de bienfaisance deviennent, en 1953, des bureaux d’aide sociale, puis des centres communaux d’action sociale en 1986
Boulanger enfournant le pain au Bureau d’aide sociale de Tourcoing, 2ème moitié du 20ème siècle,
Photographie, Coll. C.H.L.
Afin de fournir un pain « aux meilleures conditions de qualité et de prix », le Bureau de bienfaisance de Tourcoing décide d’en contrôler la production, de la confection de la farine à la cuisson. A partir de 1913, il se dote de sa propre meunerie abandonnée après la Seconde Guerre Mondiale, de pétrins mécaniques et d’un four. « C’est un pain fabriqué avec des farines de pur froment (…) similaires aux meilleures marques de la région et facturé aux prix de revient » (Archives municipales de Tourcoing, 1914). Le Bureau de bienfaisance est remplacé par le Bureau d’aide sociale qui continue à produire un millier de pains par jour dans les années cinquante.
En 1968, le Bureau d’aide sociale de Tourcoing distribue encore des pains de 700 gr deux fois par semaine. « Cette forme d’aide peut paraître périmée de nos jours car si le pain fut considéré durant de longues années comme l’aliment de base, il n’en est plus de même aujourd’hui ». Quant à la livraison à domicile, elle « crée un lien de sécurité entre les personnes âgées souvent isolées et le Bureau d’aide sociale ». Les personnes bénéficiaires ont témoigné « un ferme attachement » à ce type d’aide en nature
La première coopérative tourquennoise, intitulée « L’Economie des ménages », est fondée en 1882.
Elle s’inspire du modèle anglais, né en 1844 de l’association de 28 ouvriers tisserands de Rochdale, ville aujourd’hui jumelée à Tourcoing. « L’Economie des ménages » devient rapidement d’obédience socialiste.
Par Jean-Claude THIERRY