Pain Paquebot.

Sans titreCharles Joughin, le chef boulanger du Titanic.

LE TITANIC

Charles Joughin est né le 3 août 1878 à Liverpool. Il travaille un temps dans un restaurant, puis s’engage dans la marine. Après avoir servi la White Star Line comme chef boulanger pendant quinze ans, notamment à bord de l’Olympic, il s’engage début avril 1912 à bord du Titanic pour un salaire de 12 livres par mois . Son épouse Louise est âgée de 32 ans et originaire de l’Ile de Man, et ils sont parents  de deux petits enfants , Agnès quatre ans, et son jeune frère Roland de deux ans.

Sans titre

Une des  cuisines de l’Olympic, navire frère du Titanic, ou Charles Joughin travaillait.

Le Titanic est le plus luxueux et le plus grand paquebot jamais construit alors. La coque du Titanic est pourvue de seize compartiments étanches servant à protéger le navire en cas de voies d’eau ou d’avaries importantes. Les médias lui donnent une image de navire fiable, même si, contrairement à la légende diffusée après le naufrage, il n’a jamais été considéré comme insubmersible.

Charles Joughin, chef des boulangers, responsable de la production d’une équipe de 11 boulangers, est donc a bord ce 10 avril 1912, à 12 h 15, lorsque le Titanic appareille pour son voyage inaugural de Southampton en Angleterre, avec à son bord 953 passagers et 889 membres d’équipage, a New York. Ce même jour, a 18 h 35, le Titanic arrive à Cherbourg, ou il embarque de nouveaux passagers, a 20 h 10, le paquebot appareille de Cherbourg pour Queenstown (aujourd’hui Cobh) en Irlande .

Le 11 avril à 11 h 30, il arrive à Queenstown , embarque de nouveaux passagers et a 13 h 30,  quitte Queenstown et se dirige vers New York.

Sans titre

Le Titanic a Southampton au départ pour le voyage, le Avril 1912. Photographie expose au Musée des transport de Belfast  (DAVID LEFRANC / ABACAPRESS.COM)

Trois jours plus tard, le 14 avril, à 23 h 40, notre chef boulanger Charles Joughin,  alors qu’il se repose dans sa cabine du pont E, est réveillé par un inquiétant et lourd grincement. Vers minuit 15, apprenant que se bruit  vient de la collision avec un iceberg, il réunit ses boulangers pour leur faire monter des sacs pleins de pain à destination des canots en train d’être préparés et regagne sa cabine et pour boire une bonne dose de whisky.

Sans titre

Iceberg presumé être a l’origine du naufrage du Titanic. Photographie prise du Mackay-Bennett le 15 avril 1912.  (THE NEW YORK TIMES)

Sans titre

Les canots de sauvetage du Titanic (New York Times)

De retour sur le pont,  il aide des femmes à embarquer et de par son efficacité, il est désigné responsable du canot numéro 10. Au lieu de rester dedans, et ainsi assurer sa sécurité, il préféré, estimant qu’il y avait assez d’hommes dans le canot pour le diriger, rester sur le navire, et retourner  une dernière fois dans sa cabine boire a nouveau du whisky. Le sol de celle-ci commence à être inondé, il se décide de remonter sur le pont, mais tout les canots sont a la mer,  il jeté alors un grand nombre de chaises longues et de fauteuils en rotin par les fenêtres, espérant qu’ils serviront de refuge aux naufragés.

Sans titre

Chaise longue du Titanic (Musée maritime de l’Atlantique-Halifax-Canada)

Dans les dernières minutes du naufrage, Joughin monte sur le pont de poupe, avant d’entrer en douceur dans l’eau ,il boit une dernière gorgée d’alcool: selon lui, sa tête n’a même pas été mouillée.

Sans titre

Vers 4 heures du matin, il aperçut le canot B, qui s’était retourné, et, ne parvenant pas à grimper dessus, il le contourna en nageant pour ne pas rester immobile, et resta ainsi jusqu’à l’arrivée des secours des marins de Mackay-Bennett.

L’eau étant  à -2°C l’lorsqu’il est récupéré Joughin a les pieds si gelés qu’il doit grimper à l’échelle du navire sur les genoux. Cependant, il survit à la catastrophe sans aucune séquelle. Il arrive a New York le 16 avril 1912.

L’équipe de boulangerie ne comptera que trois survivant, Charles Reginald Burgess, 19 ans, troisième boulanger suppléant , survivant a bord du canot N 15, Henry Neal, 25 ans, ouvrier boulanger, survivant a bord du canot N 13 et  Charles Joughin. Les médecins de l’époques jugèrent que la forte dose d’alcool  ingurgité a fait que le corps du chef boulanger a réussi à se battre contre les effets de l’hypothermie.

Dessin montrant le canot no 15 ou se trouve Charles Reginald Burgess,  troisième boulanger suppléant manquant d’écraser le canot no 13, ou se trouve Henry Neal, ouvrier boulanger (The Graphic).

Sans titreSont  décédés et portés disparus :

Albert Vale Barker , 18 ans, ouvrier boulanger.

Fredrick Barnes, 37 ans, ouvrier boulanger.

George Henry  Chitty, 44 ans, ouvrier boulanger.

John  James Davies, 28 ans, second boulanger suppléant.

G. Feltham, 36 ans, boulanger viennois.

John Robert Giles, 30 ans, second boulanger.

William Edward Hines, 36 ans, troisième boulanger.

J.Smith, 24 ans, ouvrier boulanger.

T.Wake, 32 ans, ouvrier boulanger.

 

 

LE FRANCE

Le 20 avril 1912, cinq jours après le naufrage du Titanic, le paquebot France quitte le Havre pour son voyage inaugural. Mis en chantier sous le nom de Picardie, rebaptise France avant son lancement, c’est le plus grand paquebot français de cette époque. C’est un paquebot a quatre cheminées, comme le Titanic, mais heureusement celui-ci ne fera pas naufrage, nous le présentons uniquement  pour avoir une vision de ce qu’était le servie de nourriture a bord de ces paquebots de grand luxe.

Sans titre

Voici la liste des victuailles nécessaire au grand voyage, extraite d’une brochure pour le lancement « Steamership SS France » de la CGT-French Line produite en 1912 :

Au départ du Havre, le paquebot emporte : 9.000 livres de viande fraiche, soit 22 boeufs entiers, 13 moutons, 8 veaux, 4 pores, 350 rognons, 270 langues de boeuf, 550 carrés de côtelettes, 400 gigots, 80 têtes de veau, 400 pieds de veau et 29.000 kilos environ de charcuterie, volailles et gibiers, ainsi répartis : 750 kilos de charcuteries diverses, 500 pieds de porc, 75 jambonneaux, 18 barils de foie gras, 800 poulets, 700 pigeons, 180 lapins, 400 canards, 70 dindes, 50 oies, 1.100 cailles, 550 perdreaux, 250 grouses et 70 faisans. La poissonnerie est approvisionnée de 4.500 kilos de poissons divers, 40 kilos de crevettes, 250 homards ou langoustes, et les gastronomes ont à leur disposition 600 douzaines d’huitres.

A ces chiffres, ajoutons : 15.000 kilos de pommes de terre, 900 de carottes, 750 d’oignons, 750 de navets, 700 de choux-fleurs, 900 artichauts, 750 choux pommés, 400 bottes de poireaux, 700 de radis, 5.900 salades, 6.000 kilos de légumes secs, 3.700 de pâtes alimentaires, 16.000 kilos de farine pour la boulangerie, 35.000 oeufs, 3.000 livres de beurre, 5.400 boites de conserves, 1.500 kilos de fromages, 9.000 oranges, 6.000 poires, 6.000 pommes, 380 pots de confitures, 100 pots de miel, 110 kilos de dragées et pralines, 75 boites de marmelades, des fruits confits, gâteaux, etc., à profusion. Pour la boisson, il est prévu 300 kilos de thé, 500 de chocolat, 150 de café, 6.000 litres de lait frais, 6.000 kilos de sucre.

Sans titre

L’équipe de boulangers du Paquebot France (1912-1932), un seul boulanger est identifie, c’est  Jules GOUTTEUX qui est décédé a Dunkerque en livrant son pain en 1915.  (Nous remercions Michel Goutteux, petit-fils de Jules Goutteux d’avoir mis a disposition du CREBESC cette extraordinaire photographie)

Sans titre5

Les caves du paquebot « France » ne le cèdent en rien à celles des restaurants les plus célèbres. On y trouve : 60.000 flacons, dont 2.300 bouteilles de champagne, et 2.000 demi-bouteilles, 1.800 bouteilles de vins fins, 350 de vins de liqueur, 2.500 de bière, 900 de liqueurs diverses, 2.800 d’eaux minérales et 2.500 demi-bouteilles, 1.500 bouteilles de limonade, 25.000 de yin ordinaire et 30.000 litres pour l’équipage».

Afin de découvrir l’atmosphère de la boulangerie et des cuisines a bords d’un grand paquebot de luxe, bien que cela ne corresponde  pas a  l’époque du Titanic, voici des petits films tournes a bord du Paquebot France (1962-2009) :

Sans titre

http://www.frenchlines.com/metiers/service.php?service=civil

Les paquebots « France »:

SS France (1864 – 1910), paquebot de la Compagnie générale transatlantique
SS France (1912 – 1934), paquebot de la Compagnie générale transatlantique
SS France (1960 – 1979), paquebot de la Compagnie générale transatlantique, devenu Norway (1979 – 2006) puis Blue Lady (2006 – 2007)

Revenons a  Charles Joughin, il retourna en Angleterre a bord du Laponie, et a été appelé a témoigner a la Chambre de Commerce britannique lors de l’enquête sur le naufrage.

Sans titre

Après la première guerre mondiale,  Charles Joughin rejoint la marine marchande, et est au service du Baltic, toujours comme boulanger.

Sans titre

Sans titre

Après quelques années de travail au sein de croisières transatlantiques Charles Joughin décide d’émigrer au Etats-Unis et s’installe à Paterson dans le New Jersey, où il décède le 9 décembre 1956.

Sans titre

Pierre tombale de Charles Joughin au cimetière de Paterson.

Sans titre

George Rose jouant le rôle de Joughin dans le film  » Atlantique, latitude 41°  »  (1958)

Sans titre

Liam Tuohy jouant le rôle de Joughin dans le film « Titanic » (1997)

Merci à Agenais la tolérance de m’avoir communiquer ce fait, grâce à un article de journal paru dans la presse, ce qui a été le point de départ de ce petit article.

Laurent Bourcier, Picard la Fidélité, C.P.R.F.A.D.

Commentaires concernant : "Pain Paquebot." (4)

  1. Marc Simonet a écrit:

    Un article étonnant et si singulier ! Merci à vous de nous faire découvrir ce moment d’histoire.

  2. Fourthon Eric, bordelais Noble coeur a écrit:

    Formidable, bravo!

  3. christelle Girard a écrit:

    magnifique et émouvant article , passionnée par le Titanic je me suis fais une joie de lire ce sublime article sur les boulangers du Titanic/// MERCI

  4. Laurent Bonneau a écrit:

    Article passionnant Bravo !!!

Envoyer un commentaire concernant : "Pain Paquebot."

Cliquez ici pour annuler la réponse.